La reprise constitue souvent le dernier temps d'un examen oral. Après l'entretien où le candidat a répondu à une série de questions variées, l'examinateur reprend certains aspects de l'exposé. Il peut commenter certains détails – la plupart du temps en toute neutralité – et poser quelques questions qui permettent de revenir sur sa réflexion.
Un moment important
Le grand oral se prête particulièrement à un tel retour. Après un petit bilan de vos propos, le jury vous invite à prendre une dernière fois la parole pour développer des idées neuves, mais toujours en lien avec votre exposé. Au-delà des questions du dialogue, vous avez la possibilité de révéler votre mode de raisonnement.
Dans la continuité logique du dialogue, vous pouvez une dernière fois déployer vos connaissances, votre sens logique et votre éloquence. Accessoirement, il s'agit d'une occasion pour compléter l'exposé de votre projet.
L'interview
Dans un article intitulé « L'interview dans les sciences sociales et à la radio-télévision », paru dans la revue Communications en 1966, le sociologue Edgar Morin explique : « L'interview est une intervention, toujours orientée vers une communication d'informations. Mais ce processus informatif, toujours présent, peut ne pas être le processus ni le but essentiel de l'interview ; c'est le processus psychoactif lié à la communication qui peut être le plus important. »
Autrement dit, dans une interview, ce n'est pas seulement le contenu qui compte, mais le lien que l'on crée avec son public dans le jeu de questions-réponses.
De même, dans cette dernière partie du grand oral, la façon de développer sa réponse compte au moins autant que le contenu même de celle-ci. Mettez-vous donc dans la peau d'une personnalité interviewée, qui doit véhiculer une impression positive, plus qu'une érudition sur tel ou tel aspect technique.
Revenir sur sa réflexion - illustration 1
Edgar Morin.
Exprimer sa pensée en acte
Lors d'une reprise, le jury ne s'attend pas à ce que vous déclamiez une réponse parfaite. Il s'agit surtout de réfléchir intelligemment à voix haute. Vous avez le droit de donner l'impression de tâtonner. Le jury doit suivre votre pensée en train de se construire. Ce conseil s'applique pour bon nombre d'épreuves orales d'examens ou de concours dans le supérieur. Un candidat qui utilise ses connaissances avec pertinence et bon sens sera bien plus valorisé qu'un candidat érudit mais incapable de raisonner.
Prenons par exemple un projet portant sur l'agriculture de l'Asie du Sud-Est, et dont les aspects majeurs ont été traités à l'appui de nombreuses données et analyses pertinentes, dans l'exposé et le dialogue. Après avoir fait une synthèse de ce que le candidat a développé, le jury peut lui demander de réfléchir à une autre zone géographique, comme l'Amérique centrale. Il lui fournirait alors toutes les données nécessaires. Le candidat réfléchirait à haute voix pour construire sa réponse.
Une mise en jeu de sa réflexion
Vous devez varier légèrement votre réflexion en l'appliquant à un cas différent. Le jury veut s'assurer que votre projet vous servira d'un point de vue méthodologique. Vous n'avez pas seulement acquis un savoir, mais un savoir-faire.
Prenez-le comme un jeu d'analogies entre votre projet et le nouveau cadre que l'on vous propose. Si votre projet porte sur la sociologie des supporters de football, vous êtes censé pouvoir suivre un raisonnement analogue sur la sociologie des supporters de rugby ou de cyclisme, sans en tirer les mêmes conclusions.
Il peut s'agir aussi d'un changement de point de vue. Un projet d'histoire qui traite des empereurs russes au début du xxe siècle comporte en creux le point de vue des paysans et ouvriers russes de cette époque. De même, imaginons un projet de littérature sur l'influence du théâtre de Molière sur le théâtre du xviiie siècle. Si le jury présente au candidat un extrait d'une pièce de théâtre postérieure (par exemple une comédie d'Alfred de Musset) et demande au candidat d'y discerner l'influence de Molière, il aura nécessairement de quoi répondre.
L'inventivité
Une part d'inventivité peut être exigée dans cette reprise. Alors que la plupart des questions du dialogue, qu'elles soient classiques ou ouvertes, portent directement sur les connaissances du candidat, celles d'une reprise peuvent solliciter votre imagination.
L'ouverture d'esprit doit être encore plus grande que dans les questions précédentes. Soyez prêt à prendre des risques et à vous lancer dans des explications osées, qui peuvent même vous sembler farfelues au premier abord.
Surtout, essayez de ne pas sembler tétanisé par l'originalité de la question. Vous seriez bien plus pénalisé que si vous essayiez de déployer un raisonnement erroné.
Appropriation des conseils
Si le jury vous prodigue des conseils, tenez-en compte à tout prix lors de votre dernière prise de parole. L'interaction doit être réelle et fluide avec vos examinateurs.
S'ils vous adressent des critiques, ne vous en offusquez pas. Elles seront certainement constructives pour que vous approfondissiez encore vos idées. Un jury qui critique est un jury qui croit en vous !
Certaines critiques vont parfois de pair avec une excellente prestation. Le jury cherche à voir jusqu'où vous êtes capable d'aller, même s'il sait déjà qu'il vous mettra la note maximale.
Capacité d'adaptation
Votre réactivité et votre adaptation aux circonstances constituent des qualités précieuses pour le grand oral et au-delà. Tout ne se passe pas nécessairement comme prévu. Et cette dernière étape de l'épreuve ne peut de toute façon pas se passer exactement comme prévu.
De nombreux entretiens d'embauche et oraux de concours – notamment pour l'entrée dans des écoles de commerce – ont pour but de déstabiliser le candidat. La capacité d'adaptation au jury, aux questions, voire aux provocations, devient alors une qualité majeure, qui fait la différence.
Et les questions plus personnelles ?
À la toute fin de l'entretien, votre jury sera peut-être tenté de vous poser une question personnelle. Ne soyez pas surpris, et respectez le même principe que jusqu'alors : un propos clair, structuré, fluide et efficace.
Si votre projet en mathématiques porte sur l'algèbre linéaire, il sera naturel qu'on vous demande d'où provient cette idée. Soyez toujours honnête dans un premier temps : votre cousin chercheur vous l'a suggéré, ou tout simplement votre professeur. Mais dans un deuxième temps, montrez que vous vous êtes intimement approprié le sujet en question. Vous avez mené vos recherches vous-même. Vous vous êtes même pris de passion pour ce thème – sans exagérer non plus. Un enthousiasme bien dosé touche nécessairement le jury.
Ne vous étendez pas non plus sur des considérations trop personnelles, ou du moins ne vous y attardez pas. Sont évalués votre bon sens, votre agilité d'esprit et votre implication dans le projet, et non pas le détail de votre autobiographie.
Les entretiens de personnalité dans les écoles de commerce
Les entretiens de personnalité (ou de motivation) sont une étape majeure dans les concours d'admissions aux écoles de commerce.
Les candidats sont avant tout évalués sur la qualité de l'interaction qu'ils proposent au jury. Dans cette épreuve, quand le jury pose une question, il s'attend à un large éventail de réponses, dont les unes ne sont pas plus justes que les autres. Simplement, ces réponses doivent sembler authentiques, spontanées bien argumentées, présentées avec charisme, dans un équilibre entre modestie et assurance.
Le grand oral, s'il est loin d'être centré sur la personnalité du candidat, exige de telles qualités à la fin du dialogue. En ce sens, il constitue un galop d'essai pour les élèves qui s'orienteront vers de tels concours.
À éviter coûte que coûte
\bullet Ne pas réfléchir.
\bullet Ne pas répondre : dites-vous qu'un début de réflexion constitue déjà une réponse.
\bullet Plaquer une réponse toute faite.
\bullet Se braquer ou se vexer face à une critique (ou une impression de critique).
\bullet Rester silencieux trop longtemps au lieu de réfléchir à voix haute.