Sujet national, seconde partie, exercice 1, juin 2017

Énoncé

Sujet d'étude : l'Algérie de 1954 à 1962
Document
Extraits du message du général de Gaulle au Parlement lu en session extraordinaire de l'Assemblée nationale, le 20 mars 1962
« Mesdames, Messieurs les députés,
La politique poursuivie par la République depuis tantôt quatre années au sujet de l'Algérie a été, à mesure de son développement, approuvée par le Parlement, soit explicitement, soit du fait de la confiance qu'il n'a cessé d'accorder au gouvernement responsable. Le référendum du 8 janvier 1961 a démontré, quant à la direction ainsi tracée, l'accord massif et solennel du pays.
Mais, voici que la proclamation du cessez-le-feu, les mesures fixées pour l'autodétermination des populations, les conditions adoptées quant à la coopération de l'Algérie et de la France […] dans le cas où l'autodétermination instituerait un État algérien indépendant, marquent une étape décisive de cette politique. L'ensemble des dispositions arrêtées en conclusion des négociations d'Évian avec les représentants du FLN(1) et des consultations menées auprès d'autres éléments représentatifs algériens se trouve maintenant formulé dans les déclarations gouvernementales du 19 mars 1962(2).
Nul ne peut se méprendre sur la vaste portée de cet aboutissement en ce qui concerne, tant la vie nationale de la France, que son œuvre africaine et son action internationale. Nul ne peut, non plus, méconnaître les difficultés d'application qui en résultent aujourd'hui et risquent d'en résulter demain, non seulement quant à la situation d'un grand nombre de personnes et de beaucoup de choses, mais aussi dans le domaine de l'ordre public et de la sûreté de l'État. Il m'apparaît donc comme nécessaire que la nation elle-même sanctionne une aussi vaste et profonde transformation et confère au chef de l'État et au Gouvernement les moyens de résoudre, dans les moindres délais des problèmes qui seront posés à mesure de l'application.
C'est pourquoi, en vertu de l'article 11 de la Constitution j'ai décidé, sur la proposition du Gouvernement, de soumettre au référendum un projet de loi comportant l'approbation des déclarations gouvernementales du 19 mars 1962 ; autorisant le Président de la République à conclure les actes qui seront à établir au sujet de la coopération de la France et de l'Algérie si l'autodétermination institue un État algérien indépendant et enfin et jusqu'à ce que soient, dans cette éventualité, créés en Algérie des pouvoirs publics algériens, attribuant au Président de la République le pouvoir d'arrêter, par ordonnances ou par décrets pris en conseil des ministres, toutes mesures relatives à l'application de ces mêmes déclarations.
Au moment où semblent s'achever enfin les combats qui se déroulent depuis plus de sept ans et où s'ouvre à la France nouvelle et à l'Algérie nouvelle, la perspective d'une féconde et généreuse coopération, je suis sûr, mesdames, messieurs les députés, que vous voudrez vous joindre à moi pour élever le témoignage de notre confiance et de notre espérance vers la patrie et vers la République. »
Source : Journal officiel de la République française, débats parlementaires, 21 mars 1962.

Questions
1. Identifiez l'auteur de ce document et le contexte du message.
2. Expliquez la phrase soulignée puis précisez les étapes du processus de la décolonisation algérienne évoquées dans le texte.
3. Présentez le moyen constitutionnel que l'auteur souhaite utiliser pour faire accepter la décolonisation de l'Algérie. Comment justifie-t-il le recours à ce moyen ?
4. Montrez l'impact du processus de décolonisation sur les relations de l'Algérie avec la France.
(1)Front de Libération Nationale.
(2)Déclaration rendant compte des accords d'Évian.

Corrigé

1. Le général de Gaulle est l'auteur de ce discours prononcé devant l'Assemblée nationale française le 20 mars 1962. Il s'exprime alors en qualité de président de la République, fonction qu'il occupe depuis la fondation de la Ve République en 1958. La date à laquelle est prononcé ce discours n'est pas anodine puisque c'est le lendemain de la conclusion des accords d'Évian (19 mars 1962), qui sont censés mettre un terme à la guerre d'Algérie.
2. La phrase soulignée fait référence au cessez-le-feu prévu par les accords d'Évian. L'emploi du verbe « sembler » montre cependant que ce cessez-le-feu est encore hypothétique et fragile. C'est que comme le dit de Gaulle, la guerre dure depuis sept ans déjà et les tensions sont encore vives. Le conflit a véritablement commencé le 1er novembre 1954 avec la « Toussaint rouge » (vague d'attentats) organisée par le FLN. Pour en sortir, un référendum a été organisé en 1961 et des négociations entamées à Évian avec le FLN, aboutissant à la conclusion d'un accord prévoyant l'autodétermination de l'Algérie le 19 mars 1962.
3. En vertu de l'article 11 de la constitution de la Ve République dont il est l'inspirateur, le général de Gaulle entend user de son droit de convoquer un référendum, c'est-à-dire de demander aux Français de trancher eux-mêmes dans les urnes à propos de cette « vaste et profonde transformation » que constitue l'indépendance algérienne.
4. Malgré le développement d'une politique de coopération entre la France et l'Algérie, notamment dans l'éducation, les relations entre les deux pays sont profondément marquées par la guerre d'indépendance. La mémoire de ce conflit contribue à aviver à intervalles réguliers les tensions entre Paris et Alger, dont la coopération est néanmoins indispensable à la solution de nombre de problèmes, notamment sécuritaires.