La puissance des États-Unis aujourd'hui

Depuis le xixe siècle, les États-Unis se sont progressivement affirmés comme une grande puissance. Après l'émergence d'une jeune nation qui, par la doctrine Monroe de 1823, prétend défendre les Amériques des ingérences européennes, on assiste au début du xxe siècle à la construction d'un géant économique. En 1914, les États-Unis sont la première économie mondiale. Les deux guerres mondiales, où le territoire des États-Unis est sanctuarisé, voient s'accroître leur puissance militaire et diplomatique. Le rayonnement culturel et l'influence américaine se renforcent encore pendant la guerre froide, de 1947 à 1991, avant que la question de l'hyperpuissance et de sa contestation ne se pose depuis près de trente ans. Quels sont les voies et les lieux de la puissance des États-Unis ? Entre soft et hard power, comment l'influence des États-Unis reste-t-elle déterminante dans le monde malgré les contestations et les concurrences dont elle fait l'objet ?
Les lieux et les formes de la puissance aux États-Unis
La puissance des États-Unis prend plusieurs formes. Depuis le xixe siècle, elle s'appuie sur la maîtrise d'un territoire et sur le renouvellement de ses moyens. Les États-Unis ont ainsi à plusieurs reprises rendu caduques les analyses qui, face à la crise de 1929, la défaite au Vietnam en 1975, ou les attentats du 11 septembre 2001 pronostiquaient leur déclin inéluctable. Quels sont ces facteurs qui permettent ce renouvellement de la puissance ?
Le vol UA175 percutant la tour Sud lors des attentats du 11 septembre 2001
La puissance des États-Unis aujourd'hui - illustration 1
Des lieux de commandement à l'échelle mondiale
Les États-Unis possèdent sur leur territoire des lieux de commandement à l'échelle mondiale. Du point de vue des relations internationales, les sièges de l'ONU, bien que situés sur un sol international, se trouvent à New York, ville mondiale qui abrite également, avec Wall Street, la principale place boursière de la planète. Le pouvoir politique des États-Unis, à Washington, dispose de la principale armée du monde, tant du point de vue de l'arsenal nucléaire que des armes conventionnelles. Leur réseau diplomatique leur confère une influence mondiale. Le pouvoir économique se concentre également dans d'autres centres : la Californie, à elle seule, possède un PIB qui en ferait la cinquième puissance économique mondiale. Quant aux États-Unis, ils possèdent le plus important PIB mondial, avec 20 500 milliards de dollars.
Les lieux de l'innovation technologique
Les États-Unis restent un centre d'innovation encore peu concurrencé dans le monde si on prend en considération l'ensemble des secteurs en jeu. Ce smart power s'affirme dans certains lieux. Les grandes universités sont fortement liées aux industries et s'inscrivent dans chacun des trois grands ensembles urbains des États-Unis : Columbia, Princeton, Yale, Harvard dans la mégalopole de la côte est, l'Université de Chicago dans la région des grands lacs, Berkeley et Stanford en Californie. Les grandes entreprises innovantes se concentrent dans les mêmes lieux, mais une forte concentration en Californie, dans la Silicon Valley, près de San Francisco. Le siège de Google, ou Googleplex et de Facebook s'y trouve, formant de grands complexes qui centralisent des données provenant du monde entier.
Les lieux de l'influence culturelle
L'influence culturelle des États-Unis s'inscrit dans certains lieux qui sont des centres de production de produits culturels à destination des masses. Ces produits mainstream n'excluent pas l'existence d'une haute culture américaine, mais constituent l'essentiel du rayonnement culturel du pays. Les studios d'Hollywood produisent en moyenne 500 films par an et ont permis, en 2016, de dégager 50 milliards de dollars. Les superhéros diffusent partout depuis ces studios les valeurs des États-Unis, y compris, depuis quelques années, celle du doute sur leur propre puissance. Quant au siège de Disney, en Californie, il diffuse partout dans le monde des productions qui façonnent les valeurs et l'esthétique des jeunes générations. Les grands parcs à thème de Disneyland et Disney World sont des centres majeurs du tourisme aux États-Unis.
Exercice n°1
Unilatéralisme et multilatéralisme : un débat international
Les États-Unis occupent une place centrale dans le monde actuel. Mais l'usage de cette puissance est lié à d'importants débats, y compris au sein du pays.
Isolationnisme ou interventionnisme ?
Pendant le xxe siècle, plusieurs voies ont été suivies par les États-Unis. Le pays étant une démocratie libérale, sa ligne politique doit en effet tenir compte, non seulement du contexte, mais aussi du choix des électeurs et des décisions des présidents. Le président des États-Unis devant lui-même tenir compte de l'avis du Congrès. La première hésitation tient au choix de l'interventionnisme ou de l'isolationnisme. Wilson, en 1917, engage les États-Unis dans la Première Guerre mondiale, sur la promesse des alliés de créer une Société des nations (SDN). Mais en 1919, le Congrès refuse de ratifier le traité de Versailles et d'intégrer la SDN. La Seconde Guerre mondiale montre combien il est difficile de concilier puissance et isolationnisme. Mais l'idée de se consacrer davantage au territoire américain qu'au reste du monde a été un des arguments de campagne de Donald Trump. Il est pourtant, depuis son élection, confronté au rôle de puissance à l'échelle mondiale du pays qu'il dirige.
Une hyperpuissance tentée par l'unilatéralisme
Autre choix important pour la puissance américaine : mener une politique unilatérale ou multilatérale ? Dans les années 1990, après l'effondrement du bloc soviétique, les États-Unis semblent constituer l'unique hyperpuissance. Pourtant, pendant la présidence de Bill Clinton, des négociations multilatérales sont entreprises pour tenter de trouver des solutions à certains conflits, comme entre Israël et les Palestiniens. Depuis les attentats de 2001, plusieurs voies ont été envisagées. Georges W. Bush est ainsi intervenu en Irak sans mandat de l'ONU, mais avec mandat en Afghanistan. Barack Obama a mené une politique impliquant davantage ses partenaires, mais a tout de même continué à mener des actions militaires relevant du hard power, comme en Libye en 2011.
Quelle légitimité pour la puissance des États-Unis ?
Les États-Unis légitiment leur puissance par plusieurs arguments. Depuis le xixe siècle, la notion de « destinée manifeste » accorde au pays une mission civilisatrice et destinée à diffuser les idées démocratiques. Au xxe siècle, le pays a défendu la démocratie lors des deux guerres mondiales et, malgré son soutien à des régimes dictatoriaux dans certains cas, a dirigé le « monde libre » face aux dictatures communistes pendant la guerre froide. Depuis la fin de celle-ci, l'idée de diffuser la démocratie a servi de justification à certaines interventions militaires, comme celle en Irak en 2003. Il est difficile de dissocier, dans ce cas, la part qui relève de la défense des intérêts américains, notamment énergétiques, et celle qui relève de la défense de la démocratie. George Bush définit alors un « axe du mal » constitué d'« États parias » refusant la démocratie et l'ordre garanti par les États-Unis. On y compte notamment l'Iran et la Corée du Nord, qui sont également les puissances auxquelles s'oppose Donald Trump. Mais cette association du hard power à un messianisme assumé conduit à des réactions de rejet. Réactions qui peuvent aller jusqu'aux actions de lutte armée dans les pays où est présente l'armée américaine, actions terroristes, ou encore manifestations antiaméricaines dans certaines opinions publiques, comme en Amérique Latine ou dans le monde musulman. Toutefois, la plupart des personnes contestant la puissance des États-Unis en adoptent les modes de consommation et les produits culturels.
Exercice n°2Exercice n°3
Points d'appui et zones d'influence des États-Unis dans un monde multipolaire
Le monde constitue donc pour les États-Unis à la fois un espace de projection, dans lequel des espaces clefs doivent être contrôlés et un espace dans lequel leur puissance rencontre d'importantes limites liées à des résistances et à des concurrences.
Les systèmes d'alliance
Les alliances américaines sont souvent des héritages de la guerre froide et de la « pactomanie » mise en œuvre dès la fin des années 1940. On trouve en premier lieu les pays de l'OTAN, fondée en 1949. Outre le Canada, les États d'Europe occidentale et la Turquie, on y trouve depuis les années 2000 les anciennes démocraties populaires autrefois intégrées au bloc de l'Est. Une intégration qui inquiète la Russie, qui voit ainsi sa zone d'influence diminuée. L'Australie, la Nouvelle-Zélande, le Japon et la Thaïlande garantissent le contrôle du Pacifique. En Amérique Latine, l'influence reste dominante, en héritage de la doctrine Monroe, développée par le corollaire Roosevelt en 1904. Elle a toutefois attiré la résistance de Cuba, alliée des Soviétiques pendant la guerre froide, ainsi que des pays membres de l'Alliance bolivarienne pour les Amériques depuis 2004, Venezuela en tête.
Les zones clefs à contrôler
Outre ces pays alliés, les États-Unis doivent contrôler des zones stratégiques, où ils se heurtent à la rivalité d'autres acteurs, souvent des puissances régionales. Au Moyen-Orient, ils doivent sécuriser la région pour garantir les approvisionnements en hydrocarbures, tout en tenant compte de l'opposition entre Iran et Arabie Saoudite et de l'implication de la Russie dans le conflit syrien. Dans le Pacifique, l'accroissement de l'influence chinoise inquiète les alliés japonais et sud-coréen. De plus en plus, le contrôle de certaines régions du monde nécessite la prise en compte de la dimension davantage multipolaire de l'ordre international.
Les espaces de l'influence culturelle
L'influence culturelle des États-Unis est sans doute celle qui couvre l'espace le plus large et qui reste la moins contestée. Même si, dans toutes les régions du monde, on note des phénomènes de résistance ou d'acculturation, peu d'espaces restent totalement fermés aux produits de consommation venant des États-Unis. La Chine a mis en œuvre une industrie du cinéma destinée au marché national, mais elle a aussi investi massivement à Hollywood, de façon à disposer d'une influence aux États-Unis, plutôt que de s'engager dans un duel encore inégal. De même, dans le domaine de l'innovation, les puissances rivales ne disposent pas des synergies présentes aux États-Unis : la Russie possède un secteur spatial et militaire qui innove de manière assez proche de ceux des Américains, mais ne dispose pas d'un tel potentiel dans les autres domaines, notamment en informatique ou en biologie.
Exercice n°4Exercice n°5
Exercice n°1
Laquelle de ces grandes universités n'est pas américaine ?
Cochez la bonne réponse.
Yale
Harvard
Berkeley
Oxford
Columbia
Oxford est une université britannique, mais les autres universités citées comptent parmi les plus importantes situées aux États-Unis. Elles forment les étudiants non seulement à la recherche, mais aussi à leur intégration dans les meilleures entreprises.
Exercice n°2
Qu'est-ce que l'unilatéralisme ?
Cochez la bonne réponse.
Le fait de ne consulter que ses propres alliés avant d'agir.
Le fait d'agir sans consulter aucun partenaire.
Le fait de ne prendre qu'une décision à la fois.
Le fait de ne pas s'impliquer dans les affaires des autres pays.
Le fait d'être une hyperpuissance.
L'unilatéralisme consiste à assumer de disposer d'une puissance suffisante pour ne pas avoir à prendre en compte l'avis de ses partenaires lors d'une prise de décision ayant des effets sur la politique étrangère.
Exercice n°3
Qu'est-ce que la « destinée manifeste » ?
Cochez la bonne réponse.
L'idée que les États-Unis ont une mission spécifique dans le monde.
Le fait que les États-Unis agissent toujours avec des objectifs précis.
L'idée que les États-Unis doivent empêcher les ingérences européennes en Amérique.
Le fait que les pays démocratiques doivent tous s'allier aux États-Unis.
Le slogan de campagne de Donald Trump.
Cette expression, apparue sous la plume du journaliste O'Sullivan en 1845, sert, en premier lieu, à justifier la conquête de l'Ouest. Elle s'applique ensuite à l'action des États-Unis dans le monde, justifiant leurs ambitions à prendre la tête du « monde libre ».
Exercice n°4
Quand a été fondée l'OTAN ?
Cochez la bonne réponse.
1919
1947
1949
1954
1991
L'Organisation du traité de l'Atlantique nord a été fondée le 4 avril 1949, associant États-Unis, Canada et pays d'Europe occidentale. Elle s'est ensuite élargie jusqu'à intégrer, depuis l'an 2000, d'anciens pays du bloc de l'Est.
Exercice n°5
Quel est le nom de l'alliance fondée en 2004 en Amérique Latine et constituée de pays refusant l'influence américaine ?
Cochez la bonne réponse.
ALCA
ALBA
OTASE
OSCE
ANZUS
L'Alliance bolivarienne pour les Amériques a été fondée en 2004 sur une initiative du président vénézuélien Hugo Chavez. Elle compte aujourd'hui 11 pays membres, dont Cuba, allié de l'URSS pendant la guerre froide.