Introduction : qu'est-ce que l'environnement ?

I. Définir l'environnement
L'environnement est un concept qui désigne le cadre de vie des individus et des populations. Il comprend donc le milieu naturel, mais aussi les sociétés et le milieu tel qu'elles l'ont façonné. Les sciences sociales, histoire et géographie notamment, se sont d'abord intéressées à la nature et au milieu avant que n'émerge l'étude de l'environnement. En parallèle, ce dernier est devenu une préoccupation politique, et les sciences de la Terre (biologie, géologie, climatologie) se sont emparées de l'étude de l'environnement sous l'angle de l'influence des humains sur leur milieu. Cela a mené à l'élaboration de la notion d'anthropocène, qui désigne une nouvelle ère géologique caractérisée par l'impact majeur des activités humaines.
II. L'émergence de l'étude scientifique de l'environnement
En géographie et en sciences sociales, la notion de « milieu » fait référence au cadre naturel des communautés humaines. Dans le domaine des sciences de la nature, le milieu sera désigné par le biotope, c'est-à-dire par l'ensemble des éléments caractérisant un milieu physico-chimique déterminé et uniforme qui héberge une flore et une faune spécifiques. Progressivement, la notion d'environnement a émergé pour désigner le cadre de vie des individus et des populations, se distinguant du milieu, qui ne fait pas la différence entre ce qui est naturel et ce qui est anthropique : les humains font partie de l'environnement et l'influent. Ainsi, en histoire, la notion d'environnement a d'abord désigné la nature sauvage, puis elle a progressivement inclus l'ensemble de l'environnement matériel des sociétés humaines, et s'est efforcée d'historiciser la notion de nature pour montrer qu'on ne peut distinguer nettement les sociétés humaines, leur environnement matériel et la nature qui les entoure. L'histoire de l'environnement est apparue comme champ d'études aux États-Unis à partir des années 1970, puis s'est imposée à l'échelle mondiale dans les années 1990.
En sciences de la Terre, l'étude de l'environnement a pris un nouveau tour lorsqu'elle s'est orientée clairement vers l'évaluation de l'impact des activités humaines et du changement global. Ce mouvement a trouvé une structuration internationale avec la constitution du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) en 1988, à la demande du G7. Il s'agit d'une organisation internationale qui coordonne le travail de scientifiques sous l'égide des États membres afin de rédiger des rapports sur l'évolution du climat fondés sur les travaux de climatologues, de physiciens, de chimistes, de biologistes, etc. Il alerte régulièrement l'opinion mondiale sur la vitesse et la gravité du changement climatique.
Les études de l'environnement permettent ainsi de prendre la mesure de l'impact des activités humaines, et conduisent à l'élaboration du concept d'anthropocène. Ce terme est employé et popularisé à la fin du xxe siècle par le météorologue et chimiste Paul Josef Crutzen, prix Nobel de chimie en 1995, et par Eugene Stoermer, biologiste. Alors que les périodes géologiques précédentes, l'holocène et le pléistocène, sont des cycles géologiques, l'anthropocène, qui signifie « l'ère de l'humain », qualifie une période de l'histoire de notre planète au cours de laquelle l'influence humaine est devenue plus importante que les forces géologiques pour le devenir de la planète. La communauté scientifique qui a adopté le concept a cependant des divergences sur la date du début de cette ère. Pour Paul Josef Crutzen, elle commencerait lors de l'invention de la machine à vapeur par James Watt en 1784, qui marque le début de la « grande accélération » de la concentration en dioxyde de carbone dans l'atmosphère et de la dégradation des écosystèmes. Pour d'autres, c'est la révolution néolithique, avec l'essor des sociétés agricoles, qui marque le début des grands défrichements qui ne cesseront plus, et de la réduction de plus en plus marquée de la biodiversité terrestre. Enfin, d'autres auteurs retiennent la date de 1945, qui voit les premiers essais nucléaires et le début de l'usage massif des engrais chimiques en agriculture.
À l'origine utilisée en géologie, la notion d'anthropocène est aujourd'hui reprise par différentes disciplines. En biologie, elle désigne le moment à partir duquel l'espèce humaine se comporte en parasite vis-à-vis de son environnement qu'il dégrade. Ainsi, la Terre a perdu 50 % de sa couverture végétale depuis 2 000 ans et 25 % de sa biomasse depuis deux siècles. En sciences sociales, la notion d'anthropocène invite à considérer la mondialisation et les rapports entre les humains et leur environnement en prenant en compte les apports des sciences de la Terre. L'anthropocène est donc un concept récent mais riche par les débats qu'il suscite et le travail interdisciplinaire qu'il favorise.
III. L'environnement comme préoccupation politique et sociale
Si l'environnement a pu ainsi émerger et se construire comme champ scientifique, c'est grâce à une conscience sociale et politique précoce des enjeux environnementaux. L'émergence de la préoccupation environnementale se fait d'abord au travers de la préservation des milieux naturels, comme les forêts. Au xixe siècle en Europe, les romantiques se montrent sensibles à l'impact de la société industrielle sur la nature. Le groupe de peintres romantiques de l'école de Barbizon se mobilise ainsi pour la préservation de la forêt de Fontainebleau. En effet, l'administration générale des forêts entreprend le boisement des clairières et des landes avec des résineux et pratique des coupes claires dans les futaies de feuillus. Théodore Rousseau et d'autres peintres entreprennent en parallèle l'arrachage des plants de résineux et une campagne de presse pour demander la fin des coupes claires. Ils obtiennent en 1853 la création de réserves soustraites aux coupes des forestiers. Aux États-Unis, le transcendantalisme d'Henri-David Thoreau insiste également sur la contemplation de la nature et les menaces liées à la société industrielle. Ces visions de la beauté et de l'équilibre des espaces naturels ont inspiré la création des parcs nationaux et motivent encore certains mouvements écologistes. Ainsi, en 1994, toujours à Fontainebleau, 6 000 cèdres sont arrachés par des écologistes qui se nomment « éco-guerriers » et qui souhaitent privilégier la présence de chênes dans la forêt. La préservation de la nature était également une préoccupation pour les États ou les entreprises lorsqu'il s'agissait de gérer un patrimoine. C'est ainsi que les forêts françaises ont fait l'objet de mesures de protection particulières depuis Colbert et que des parcs nationaux ont été mis en place aux États-Unis pour protéger de vastes espaces de nature sauvage, aujourd'hui destinés au tourisme.
L'écologie devient un courant politique dans les années 1970, avec l'émergence de l'écologie politique. Elle puise ses racines dans le rejet de la société de consommation, les mouvements de Mai 68 et hippie, la non-violence et le refus du nucléaire. L'écologie politique se distingue donc de l'idéal de préservation de la nature pour appréhender l'environnement comme un tout dont l'humanité est l'une des composantes. L'enjeu n'est pas de sauvegarder des espaces naturels dans leur intégrité, mais de préserver un équilibre global et d'assurer un cadre de vie de qualité aux humains. L'écologie politique se développe à l'origine au cours de mouvements de lutte, comme la mobilisation antinucléaire de Wyhl en Allemagne en 1973 ou contre l'implantation d'une base militaire sur le plateau du Larzac en France à partir de 1971. On assiste en parallèle à la création de partis politiques plaçant la question environnementale au cœur de leurs préoccupations, comme le parti PEOPLE au Royaume-Uni en 1972 ou les Grünen en Allemagne en 1980. L'écologie politique se situe alors à gauche de l'échiquier politique.
Avec l'essor de la préoccupation environnementale dans les années 2000, l'écologie devient un thème plus largement mis en avant par les partis politiques de tous les bords, en même temps que la préservation de l'environnement devient une préoccupation internationale. Dès 1972, le club de Rome, un groupe de réflexion international comprenant des scientifiques, des économistes et des industriels, avait publié un rapport alertant sur les limites de la croissance. Le premier Sommet de la Terre date de la même année. Mais ce sont les conférences des parties (COP), dont celle de Kyoto en 1997 et celle de Paris en 2015 qui constituent les efforts internationaux les plus importants dans la lutte contre le réchauffement climatique. Dans les populations, la question climatique est devenue un thème de ralliement important, et les marches pour le climat, organisées par des associations et des collectifs depuis 2014, ont rassemblé des millions de gens afin de demander plus d'actions des gouvernements.
Pour conclure, malgré un intérêt politique, social et scientifique pour la question environnementale, du fait des intérêts économiques en jeu, les États et les entreprises ont encore une action limitée en matière climatique, et les projections restent très pessimistes sur notre capacité à limiter le changement global. Ainsi, le GIEC a souligné dans son rapport de 2019 que « le réchauffement dû aux émissions anthropiques mondiales qui ont eu lieu depuis l'époque préindustrielle jusqu'à présent persistera pendant des siècles à des millénaires et continuera de causer d'autres changements à long terme dans le système climatique tels que l'élévation du niveau de la mer, avec des impacts associés à ces modifications ». Ils mettent également en évidence la mise en place de boucles de rétroaction, ou cercles vicieux, telle la fonte du pergélisol, ou sol gelé en permanence, qui va libérer d'immenses quantités de gaz à effet de serre et qui vont à leur tour accélérer la fonte des glaces.
Parc des expositions du Bourget où ont eu lieu les négociations de la COP21 en 2015, France.
Parc des expositions du Bourget où ont eu lieu les négociations de la COP21 en 2015, France.
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