Le bonheur

« Tous les hommes recherchent d'être heureux », disait Pascal. Or, si c'est une recherche, il faut savoir en quoi consiste le bonheur, puis à quelles conditions il est atteint. Est-il même accessible ?
D'abord, le bonheur se réduit-il aux plaisirs ? Une première conception du bonheur consiste dans l'hédonisme, qui le définit comme l'accumulation de plaisirs. Mais Platon montre que le plaisir est éphémère et qu'il ne nous satisfait jamais pleinement. Car de nouveaux désirs viendront remplacer ceux que j'ai accomplis. C'est pourquoi, dans le Gorgias, il décrit cet état comme celui d'un tonneau percé. Platon prône alors la modération de nos désirs pour trouver le bonheur.
Selon Bergson, le plaisir est plutôt une ruse de la nature. C'est ce qui nous incite à rester en vie. Il montre que c'est la joie, plutôt que le plaisir, qui est la condition du bonheur. Car la joie, c'est le sentiment d'accomplissement.
Comment alors concilier ces deux conditions du bonheur ? Pour être heureux, faut-il rechercher l'état parfait ? Épicure conçoit le bonheur comme un état de tranquillité de l'âme : l'ataraxie. Pour l'atteindre, il faut éviter la souffrance du manque. Il faut aussi avoir apprécié le plaisir quand il est présent. C'est pourquoi Épicure établit une hiérarchie des désirs. Il distingue ceux qui sont naturels et nécessaires. Ce sont les besoins qui font cesser la souffrance et apportent du plaisir. Et ceux qui ne le sont pas comme la richesse, l'abondance. Ces désirs donnent du plaisir mais ils provoquent plus de souffrances, dans leur recherche ou l'habitude qu'ils créent.
D'après les stoïciens, pour être heureux, il faut être capable de se maîtriser par la raison. On peut alors atteindre l'état d'apathie. C'est-à-dire un état dans lequel on peut éviter d'être affecté négativement par les accidents de la vie. Pour cela, il faut distinguer ce qui dépend de nous et ce qui n'en dépend pas. C'est ainsi que l'homme peut accepter son destin.
Le bonheur réclame donc une maîtrise de soi. Mais est-elle réalisable ? Le bonheur est-il accessible ? Dans les Fondements de la métaphysique des mœurs, Kant affirme que le bonheur est « un idéal de l'imagination ». En effet, le bonheur ne peut être défini universellement car il est subjectif. Chacun imagine son bonheur. D'autre part, il n'y a aucune méthode pour être heureux qui puisse être établie par la raison.
D'après Schopenhauer, la vie n'est même que souffrance. Elle oscille constamment entre deux états. D'abord le désir, qui nous fait souffrir du manque de ce qu'on désire. Puis l'ennui de ce qu'on a. Cet ennui provoque à nouveau le désir, et ainsi recommence le cycle. Pour cette philosophie pessimiste, on ne peut qu'atténuer cette souffrance existentielle. Pour cela, il faut renoncer au « vouloir-vivre », c'est-à-dire abandonner le désir, particulièrement celui d'être heureux.
Le bonheur semble alors relever d'un idéal inaccessible, l'existence étant irréconciliable avec les conditions du bonheur.
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