Les organisations peuvent-elles s'affranchir des questions de société ?

Les pratiques de corruption peuvent toucher toutes les formes d’organisations (entreprise, organisation publique, organisation de la société civile) et régulièrement de grandes affaires financières soulèvent également des questions d’ordre éthique. En réponse à ces difficultés, les organisations ont mis en place des actions de prévention et de lutte contre lesdites pratiques afin de diffuser une image transparente de leur activité, notamment par une information financière fiable. Au-delà de leurs propres buts, des organisations peuvent d’ailleurs intégrer des préoccupations civiques en partageant des valeurs humanistes et en participant à des missions d’intérêt général afin d’améliorer les pratiques démocratiques en interne.
1. L’éthique dans l’entreprise
1.1. L’éthique dans les affaires
Toutes les formes d’entreprises peuvent être touchées par des problématiques morales. Ignorer des pratiques ou des comportements contraires à l’éthique, qu’ils soient le fait de l’organisation ou de ses dirigeants, représente un risque pour la pérennité de l’entité. En effet, une entreprise pourra perdre des clients en produisant sans respecter le droit des travailleurs. Dans un contexte mondialisé et ultra concurrentiel, les entreprises sont parfois amenées à mettre en œuvre des actions commerciales condamnables dans le but de vendre leurs produits dans une logique peu durable : clauses abusives, publicités mensongères, vente forcée, mauvaise gestion des déchets ou conditions de travail indécentes.
La notion d'éthique peut apparaître au premier abord difficilement compatible avec la démarche marketing des organisations, car l'éthique désigne un ensemble de règles morales susceptibles de s’opposer à la recherche du profit. Mais si nous comprenons par « éthique » des comportements régis par la transparence et le respect des parties, alors certaines entreprises entrent dans ce champ. D'ailleurs, de plus en plus, les organisations s’imposent des règles d'autodiscipline (chartes, codes de déontologie, respects de labels).
1.2. La déontologie
La déontologie est l'ensemble des règles morales qui régissent une profession et la conduite de ceux qui l'exercent. L'adoption croissante des codes déontologiques par les entreprises permet d'émettre un signal positif vers les consommateurs. C'est un engagement de bon comportement et de transparence dans les pratiques commerciales qui a pour but de les rassurer.
Par exemple, Apple a suspendu, en 2020, ses commandes auprès d’une entreprise taïwanaise spécialisée dans l’assemblage de pièces électroniques, car des violations strictes du code de déontologie d’Apple avaient été observées.
1.3. Les chartes rédigées par les entreprises
Les chartes éthiques sont des textes rédigés par les entreprises afin de promouvoir leur vision et la mise en œuvre de pratiques moralement et socialement acceptables. Ces textes n'ont pas de portée juridique et reprennent en général les éléments contenus dans la loi (respect de la diversité, transparence, dignité au travail, etc.). Les chartes éthiques constituent des éléments de communication à destination de l'ensemble des acteurs (consommateurs, salariés, pouvoirs publics) afin, là encore, de les rassurer et de capitaliser une image d'entreprise responsable.
2. Les autres organisations concernées par les questions éthiques
2.1. Les organisations publiques
La montée de la défiance des citoyens envers leurs élus a conduit les pouvoirs publics (au niveau national comme au niveau des collectivités territoriales) à se préoccuper des questions d’éthique et de déontologie.
Le ministère de l’Intérieur, par exemple, utilise les services d’un référent déontologue indépendant qui accompagne et conseille les agents du ministère ou la hiérarchie elle-même face à leurs questions déontologiques. Ces outils sont récents et ont peu de valeur contraignante. Le déontologue du ministère de l’Intérieur n’a, par exemple, ni pouvoir hiérarchique, ni pouvoir de sanction.
2.2. Les organisations non gouvernementales
Le succès et la pérennité des ONG résidant en partie dans leur capacité à susciter et garder la confiance de leurs parties prenantes : donateurs, bailleurs, bénéficiaires, partenaires, équipes et grand public. Pour cela, elles doivent être en mesure d’apporter, tant dans leur fonctionnement que dans leurs actions, des garanties sur une éthique exemplaire, une gouvernance démocratique et une bonne gestion.
Des besoins croissants liés au contexte international et au désengagement des États incitent les ONG à rechercher toujours plus de fonds et de moyens opérationnels. Le danger est que les ONG, devenues des multinationales, se perdent dans leurs contradictions. En effet, entre les plaidoyers et la collecte, les messages sont différents et prêtent à confusion.
3. La normalisation comptable et l’information financière
La description de l'activité de l'entreprise passe nécessairement par la construction de son image financière. Cette modalité de représentation est indispensable pour faciliter les échanges avec les différents partenaires économiques. Pour que sa pertinence soit sous contrôle, cette information financière doit obéir à des normes comptables.
3.1. La place et le rôle de l'information financière dans les processus de l'entreprise
Au sein de l'entreprise, l'information financière permet aux différents responsables de prendre la bonne décision, qu'elle soit d'ordre :
opérationnelle. Exemple : la trésorerie de l'entreprise est négative sur quelques jours, le comptable doit demander une autorisation de découvert à la banque ;
tactique. Exemple : un nouveau concurrent arrive sur le marché, le directeur commercial doit être à l'écoute de ses clients pour éviter de perdre des parts de marché ;
stratégique. Exemple : un investissement de productivité est rendu nécessaire pour s'adapter au progrès technique. Le directeur général doit choisir le financement le plus adapté à l'entreprise.
3.2. Les besoins d'information financière des parties prenantes
L'information financière est multiple et ne saurait se limiter aux documents comptables qui font l'objet d'un enregistrement et doit être élargie à tout document susceptible d'intéresser l'entreprise : courriers, bons de commande et de réception, lettres de relance, devis, etc.
En interne :
• le chef d’entreprise s’assure de la bonne marche de son entreprise ;
• les salariés s’informent sur la pérennité de l'entreprise dans laquelle ils travaillent ;
• les représentants du personnel apprennent à mieux connaître l'entreprise et assurer ainsi une meilleure protection des salariés.
En externe, l'information financière de l'entreprise est nécessaire pour que :
• les fournisseurs puissent vérifier que l'entreprise est solvable ;
• les clients s'assurent que l'entreprise suit ses produits et propose un service après-vente ;
• les actionnaires prennent connaissance du résultat dans une optique de répartition des bénéfices ;
• l'État vérifie la régularité de la comptabilité de l'entreprise (lutte contre les comportements frauduleux) ainsi que le calcul de l'assiette des différents impôts qu'il est amené à percevoir ;
• la banque, en cas d'emprunt, s'assure que l'entreprise est capable de rembourser.
En interne comme en externe, l'information financière assure une vision à court et long terme de l'entreprise et constitue un élément de preuve dans la vie des affaires.
Cette information financière constitue donc la mémoire de l'entreprise et constitue une véritable aide à la décision.
3.3. Le cadre comptable, la notion d'« image fidèle »
Cette information financière est donc multiple, ce qui rend nécessaire son harmonisation afin de permettre une lecture facilitée et fiable par tous les acteurs. L’information financière s'inscrit par conséquent au sein d'un cadre comptable qui repose sur des règles et des principes.
Dans un souci d'harmonisation au niveau international, il existe une véritable convergence entre les normes françaises, européennes et anglo-saxonnes. L'organisme normalisateur en France est l'Autorité des Normes Comptables (ANC).
Cette normalisation comptable permet d'établir des statistiques par secteur d'activité et alimente les bases d'information gérées par différents organismes (Insee). Elle permet des comparaisons :
• dans le temps : évolution chiffrée de l'entreprise sur plusieurs années ;
• dans l'espace : entre des entreprises du même secteur, au niveau national comme au niveau international.
La normalisation est rendue plus facile et plus accessible grâce à l'évolution technologique et à l'utilisation généralisée de l'informatique pour la production des comptes.
4. La lutte contre les discriminations dans les relations de travail
Les organisations sont de plus en plus sensibles à la lutte contre les pratiques discriminatoires du fait notamment de pressions liées à leur environnement et du risque pesant sur leur image. Le gouvernement et de nombreuses associations réalisent par exemple des testings pour identifier les grandes entreprises se rendant coupables de discrimination à l’embauche. En effet, dès le recrutement, un risque de discrimination peut apparaître du fait de certains critères comme l’âge, le sexe, l’origine, l’état de santé ou le handicap, par exemple. Les recruteurs doivent donc être responsabilisés et le respect des textes réglementaires doit être au centre du processus de recrutement.
Après la phase de recrutement, le respect des personnes est encouragé afin de favoriser un climat social apaisé et l’amélioration de la performance. En effet, varier les profils des collaborateurs est source d'innovation et de croissance. Néanmoins, au sein des organisations, il existe d’autres risques de discrimination liés au déroulement de la carrière et à la politique de rémunération. Par conséquent, le législateur établit des règles, une fois encore. Par exemple, l’égalité des rémunérations entre les hommes et les femmes (« à travail égal, salaire égal ! »).
Certaines organisations mettent en place des outils de lutte contre les discriminations. La SNCF, par exemple, a signé une Charte de la diversité en 2004. Depuis, le groupe s’est fermement engagé dans la lutte contre toutes les formes de discrimination en mettant en place un dispositif d’alerte professionnelle et divers plans d’action ciblés.
5. L’intégration des préoccupations civiques dans l’organisation
5.1. L’entreprise citoyenne
L'entreprise citoyenne s'implique dans la vie des citoyens par le mécénat, le choix de ses implantations, l'aide humanitaire ou encore le soutien d’organisations non gouvernementales (ONG). Une entreprise pratiquant le mécénat permet, par son soutien financier, la réalisation de projets artistiques, culturels ou humanitaires (ex : création de la Fondation Cartier pour aider les artistes contemporains).
L’action des entreprises citoyennes est encouragée par de nombreuses collectivités territoriales qui accordent des subventions et facilitent l’implantation des firmes dans des régions où l'activité économique est encore insuffisante. Cela permet de redynamiser les territoires moins favorisés.
5.2. La démocratie participative
Au sein des organisations se répand l’idée que la prise de décisions doit être moins solitaire. Les parties prenantes internes et externes sont de plus en plus consultées. Pour les entreprises, il s'agit par exemple des fournisseurs et de leurs clients, mais aussi d’associations de respect de l’environnement, par exemple. Ce phénomène vise à pallier le désengagement des salariés dans l’organisation, mais aussi à impliquer l’ensemble des acteurs externes dans la démarche de création de valeur de l’organisation.
Dans certaines mairies, les habitants sont consultés et des espaces de dialogues sont créés dans l’objectif d’associer les habitants aux décisions politiques.
À retenir
Les pratiques de corruption et les grandes affaires financières contemporaines ont placé les notions d’éthique et de déontologie au centre des débats. De nombreuses organisations luttent contre les actions discriminatoires au travail (inégalité femmes-hommes, discriminations raciales, etc.).
Afin d’assurer une image positive de leur organisation, les dirigeants mettent en place une information financière fiable et sincère dans le respect des normes comptables. Les entreprises peuvent également réaliser des actions de mécénat et développer des pratiques de démocratie participative pour soutenir leur environnement.
Exercice n°1
La notion d’éthique désigne :
Cochez la (ou les) bonne(s) réponse(s).
un ensemble de règles commerciales.
un ensemble de règles morales.
un ensemble de règles financières.
L'éthique désigne un ensemble de règles morales qui intègrent l'altruisme et la gratuité. Il faut comprendre l’éthique dans le cadre de pratiques commerciales comme des comportements régis par la transparence et le respect des parties.
Exercice n°2
Les organisations concernées par les questions d’éthique sont :
Cochez la (ou les) bonne(s) réponse(s).
les entreprises.
les organisations publiques.
les organisations de la société civile.
Toutes les organisations peuvent être touchées par de la corruption ou par des pratiques discriminatoires, l’éthique est donc au centre de la réflexion de l’ensemble des organisations.
Exercice n°3
Les acteurs internes intéressés par l’information financière de l’entreprise sont :
Cochez la (ou les) bonne(s) réponse(s).
les fournisseurs et les clients.
les actionnaires.
les salariés et leurs représentants.
le dirigeant de l’entreprise.
Plusieurs acteurs internes utilisent l’information financière : le chef d’entreprise, les salariés qui s’informent sur la pérennité de l'entreprise et leurs représentants.
Exercice n°4
La normalisation comptable permet :
Cochez la (ou les) bonne(s) réponse(s).
la lutte contre les discriminations
la lecture facilitée et fiable des documents financiers.
la comparaison des informations financières dans le temps.
La normalisation comptable permet une lecture facilitée et fiable par tous les acteurs de l’information financière grâce à l’harmonisation des pratiques et des documents financiers. Elle facilite les comparaisons dans le temps et dans l'espace.
Exercice n°5
Le mécénat consiste pour les entreprises à :
Cochez la bonne réponse.
assurer une image positive de ses produits.
soutenir financièrement et sans contrepartie une œuvre ou une personne pour l'exercice d'activités présentant un intérêt général.
présenter aux salariés un plan de lutte contre les discriminations.
Le mécénat est un soutien financier sous forme de don afin de soutenir une activité d’intérêt général. Cet engagement des entreprises et parfois des particuliers peut être également réalisé en nature (don de produits) ou en compétences.