Comment assurer un fonctionnement cohérent des organisations ?


Fiche

Les modes de production de biens et services requièrent une organisation du travail adaptée. Certaines organisations du travail favorisent la polyvalence quand d'autres parcellisent les tâches, avec des lignes hiérarchiques plus ou moins importantes. Il résulte de l'ensemble de ces choix des organisations du travail plus ou moins flexibles et plus ou moins réactives. Il est nécessaire, face à la différenciation des services de l'organisation qui accompagnent son développement, de veiller à coordonner le travail voire à faire évoluer les modes de coordination, pour assurer la cohérence de l'ensemble du travail à réaliser. À un certain niveau, les mécanismes de coordination s'accompagnent d'une délégation du pouvoir de décision. Cette délégation peut également correspondre à un choix managérial du dirigeant. Il est à noter que si les pratiques de management influencent la performance économique, les décisions prises concernant l'organisation du travail influencent également la performance sociale.
1. L'organisation du travail
Toutes les organisations, à un moment donné, sont contraintes de diviser le travail en tâches dans une optique de spécialisation des postes. En effet, la division du travail en tâches, puis sa répartition au sein d'une organisation, permettent d'améliorer la productivité des individus et de rationaliser le processus productif, ce qui est indispensable dès que le travail devient complexe ou lorsqu'il faut produire de manière massive. Seulement, dans un environnement complexe et changeant, les organisations souhaitent favoriser davantage de polyvalence pour améliorer leur réactivité.
1.1. L'organisation rigide du travail
1.1.1. Le taylorisme
Le taylorisme désigne l'organisation scientifique du travail (OST). Son inventeur, l'ingénieur américain Frederick Winslow Taylor (1856-1915) préconise une spécialisation des tâches des ouvriers.
L'un des grands principes du taylorisme est la double division du travail :
• une division verticale par la distinction entre les tâches de conception, effectuées par les ingénieurs de manières scientifiques et celles d'exécution réalisées par les ouvriers. Concrètement, ceux qui exécutent ne sont pas ceux qui réfléchissent ;
• une division horizontale par la décomposition du processus de production en tâches simples et répétitives, confiées chacune à un travailleur non qualifié, afin d'automatiser et d'accélérer leurs gestes. L'objectif est d'automatiser les gestes des ouvriers afin que les techniques de production permettent une augmentation de la productivité.
Dans ce cadre, Taylor choisira de payer le salarié en fonction de son rendement et de sa productivité pour lui faire augmenter son rythme de travail.
1.1.2. Le fordisme
Henry Ford (1863-1947) est le fondateur du constructeur automobile américain Ford. Il donne son nom au fordisme, une méthode de production inspirée du taylorisme qui fait apparaître le travail à la chaîne. Ford va instaurer un salaire journalier élevé dans le dessein de motiver les salariés. Il souhaite que chaque salarié gagne assez pour pouvoir acheter le produit qu'il fabrique, soit une automobile de la marque Ford.
1.1.3. Les limites d'une organisation rigide du travail
Le taylorisme puis le fordisme vont provoquer, en échange d'une rémunération élevée pour l'époque, une dégradation des conditions de travail. Les gestes répétitifs et monotones, le travail à la chaîne, le stress du travail chronométré créent de l'insatisfaction chez les salariés. Les salaires, même s'ils sont plus importants qu'ailleurs, ne pourront pas suffisamment compenser la démotivation, l'absentéisme et le turnover des ouvriers. Enfin, le taylorisme et le fordisme ont reculé face aux mutations technologiques qui ont nécessité du personnel qualifié avec des exigences de conditions de travail plus importantes.
Toutefois, même si elle est moins présente, l'organisation rigide du travail existe toujours dans certaines industries et dans le secteur des services (restauration rapide, centres d'appels, etc.).
1.2. L'organisation souple du travail : le toyotisme
En réaction à l'organisation rigide du travail et à ses effets négatifs sur les ressources humaines, un ingénieur de Toyota, Taiichi Ohno (1912-1990), va promouvoir une organisation du travail avec un degré faible de formalisation et de spécialisation des tâches. Par conséquent, il favorise la polyvalence, l'autonomie et la prise d'initiative des salariés. Le salarié est consulté et son travail est reconnu, ce qui se révèle une source de motivation qui avait disparu dans le taylorisme.
La flexibilité du toyotisme permet une plus grande souplesse du travail et répond au besoin exprimé par les consommateurs de produits moins standardisés. La volonté des clients d'acquérir des biens ou des services plus personnalisés va aussi entraîner la volonté de Toyota de travailler avec des stocks très limités. Toyota produit à partir de la commande du client (en « juste à temps »). Ainsi, il pourra rapidement réagir aux changements de son marché et être plus compétitif face à la concurrence. Évidemment, cela nécessite des ouvriers polyvalents.
2. Les mécanismes de coordination du travail
La division du travail puis sa répartition au sein d'une organisation permettent d'améliorer la productivité et de rationaliser le processus productif. Seulement, elle nécessite de concevoir des mécanismes de coordination assurant l'articulation entre ces différentes tâches et personnes :
l'ajustement mutuel : la coordination se réalise à travers une communication informelle et directe entre les individus composant l'organisation (exemple : une simple discussion) ;
la supervision directe : un supérieur hiérarchique donne des instructions à plusieurs autres subordonnés qui travaillent sous son contrôle ;
l'ajustement par standardisation : dans ce mode de coordination, des standards de procédures ou de résultats sont définis afin d'uniformiser les pratiques des salariés et les résultats obtenus :
➢ l'organisation du travail peut être uniformisée à partir de procédures employées dans l'organisation. Dans ce cadre, pour chaque poste de travail, les tâches des individus sont prédéfinies par des normes et des standards techniques ;
➢ la mise en place de mesure d'évaluation standard de la performance ou d'objectifs à atteindre (quantitatifs ou qualitatifs) va permettre une standardisation des résultats (exemple : fixer le nombre de dossiers de demandeurs d'emploi à traiter par jour pour un conseiller Pôle emploi).
3. La délégation du pouvoir de décision
Les différents mécanismes de coordination s'accompagnent, en général, d'une délégation du pouvoir de décision plus ou moins forte. En fonction d'un projet, d'un événement ou sur le long terme, le dirigeant peut transférer son autorité.
Lorsque l'organisation grandit, la décentralisation des décisions va s'imposer afin de permettre à l'organisation de rester réactive, car l'autorisation du dirigeant sur chaque sujet prendrait trop de temps. Cette délégation peut motiver les individus à prendre des responsabilités et à être plus autonomes face à leurs travaux.
4. L'impact de l'organisation du travail sur la performance
La performance économique, mesurable par des indicateurs comme le profit ou l'évolution du chiffre d'affaires, est indissociable de la performance sociale qui est, elle, mesurable par d'autres indicateurs : la satisfaction des salariés, les taux d'absentéisme, de rotation du personnel, les accidents du travail et les maladies professionnelles, etc.
Pour une performance durable, le management doit tenir compte des coûts engendrés par une mauvaise performance sociale (coûts des accidents, remplacement des salariés, formation et intégration des recrues, perte de savoir-faire, etc.). La recherche de la performance sociale est donc à la fois un objectif final (responsabilité sociale et éthique de l'entreprise) et un objectif intermédiaire pour atteindre la performance économique.
À retenir
Toutes les organisations sont contraintes dès leur création à diviser le travail en tâches. Les notions de taylorisme et de toyotisme font référence à des organisations rigides du travail se basant sur la spécialisation des individus. Malgré des rémunérations plus importantes que les entreprises concurrentes, on recense des problèmes de démotivation, de turnover ou d'absentéisme avec ce type d'organisation. Ces nombreuses limites vont permettre l'apparition du toyotisme et d'une organisation du travail plus souple afin de permettre aux organisations de s'adapter plus facilement à leur environnement. Cette organisation du travail plus souple va développer la notion de polyvalence et le développement de compétences sur des postes de travail qualifiés.
À mesure que la division du travail s'amplifie et que les tâches deviennent plus complexes, la mise en place de modes de coordination s'impose afin d'assurer la cohérence de l'ensemble du travail à réaliser. Cette coordination peut s'accompagner d'une délégation du pouvoir de décision.
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