Quels choix d'organisation de la production pour concilier flexibilité, qualité et maîtrise des coûts ?


Fiche

Avant de déterminer le mode de production à utiliser, chaque organisation interroge sa capacité d'innover dans ses procédés de production afin de mieux adapter son offre aux besoins des clients ou des usagers et d'accroître sa performance. L'organisation va devoir réaliser des choix stratégiques portant sur les modes de production de biens ou de services et sur la logistique à déployer. Elle va également, dans une optique d'amélioration de la performance, contrôler la qualité et les coûts à chaque stade de la production.
1. Les processus de production
1.1. L'innovation de procédés
Pour une organisation, innover dans ses procédés consiste à mettre au point ou à adopter des méthodes de production plus flexibles et/ou des méthodes de distribution nouvelles ou considérablement améliorées.
Exemple : la chaîne de montage, la production assistée par ordinateur (PAO) et plus récemment les bornes de commandes dans les fast-foods et les applications de click and collect ont été des innovations de procédés.
L'objectif de ces innovations est de mieux répondre aux besoins actuels des clients et d'accentuer la performance de l'organisation dans toutes ses composantes.
1.2. Les modes de production
Le choix stratégique du mode de production dépend, le plus souvent, de la nature du bien fabriqué ou du service offert. Il concerne aussi bien les entreprises industrielles qui produisent des produits finis que les organisations produisant des services. On peut distinguer trois grands modes de production :
La production continue : il s'agit de la fabrication sans interruption (ou presque) de produits par une organisation. Le caractère continu est nécessaire afin de permettre la production de biens dont l'intégrité ne supporte pas d'arrêt lors de sa production. Par exemple, les industries pétrolière, d'électricité, agroalimentaire, nucléaire, et métallurgique utilisent ce système ;
La production unitaire : il s'agit de la fabrication d'un produit unique ou en très faible quantité. On rencontre ce type de production pour des articles sur mesure de haute couture, des œuvres d'art, mais également dans certaines industries aux marchés restreints comme les avions ou les navires ;
La production en série : cette méthode consiste à réaliser un grand nombre de produits standardisés. Selon les débouchés des produits, la fabrication se fera en petite ou grande série uniforme. Nous pouvons citer, comme exemple, les bouteilles d'eau, les voitures grand public, l'électroménager.
1.3 Les particularités de la production de services
Un service est un produit intangible et non stockable. Lors de la fabrication du service (« servuction »), le client ou l'usager participe plus ou moins directement au processus de production, ce qui rend chaque service unique.
Par exemple, le client d'un fast-food va fournir des informations nécessaires à l'établissement de sa commande ou exécuter certains actes comme lorsqu'il va rapporter son plateau.
Les nouvelles technologies ont permis d‘automatiser certaines étapes de la production de services dans le cadre d'un workflow (voir la fiche t_mgsdg_04).
2. La chaîne logistique
La logistique représente l'ensemble des activités permettant de mettre à disposition la bonne quantité de produits au moindre coût, au moment et à l'endroit où une demande existe. Elle est source de création de valeur dans la mesure où elle vise à optimiser de façon continue tous les processus de la chaîne d'approvisionnement.
La notion de gestion de la chaîne logistique, ou supply chain management en anglais, complète celle de la logistique proprement dite dans sa dimension de pilotage, car elle représente les étapes qui devraient être effectuées pour acheminer un produit au consommateur. Nous pouvons distinguer deux types de gestion de la logistique :
La méthode des flux poussés : c'est à partir de prévisions de la demande finale des clients que le producteur va réaliser sa fabrication. Ici, la production « pousse » à la commercialisation. Cette méthode provoque à différents stades de la production, la création de stocks : des stocks de matières premières, de produits finis, etc. L'un des inconvénients de cette méthode est donc la gestion des stocks et le coût afférent ;
La méthode des flux tendus : dans la méthode des flux tendus (ou « juste à temps »), la production débute après la commande du client. L'organisation ne produit que ce qu'elle sait pouvoir vendre. Par conséquent, les stocks sont réduits au minimum ou sont inexistants.
Évidemment, dans de nombreuses organisations, la logistique combine en partie ces deux méthodes selon les avantages de chacune et l'importance stratégique de telle ou telle partie de la production.
3. La démarche qualité : un enjeu concurrentiel
La démarche qualité est au cœur du pilotage de la production, car elle renforce la compétitivité de l'organisation. Elle se définit comme l'ensemble des dispositions à prendre pour améliorer la production à chaque étape et satisfaire de façon optimale les exigences de ceux à qui elle est destinée à moindre coût.
La qualité représente l'ensemble des caractéristiques d'un produit qui lui confèrent l'aptitude à satisfaire des besoins exprimés ou implicites. La qualité est un enjeu concurrentiel majeur, car elle ne se limite pas à la production des biens, mais concerne également la qualité des services, y compris celle des services publics : qualité de l'information du public, personnalisation des relations entre l'usager et l'agent, amélioration et simplification des démarches et formalités administratives, réduction des délais. La qualité constitue donc un véritable enjeu stratégique. Elle permet une amélioration de l'image de l'organisation et la fidélisation des usagers/clients.
Toutefois, des coûts supplémentaires sont liés à la création de biens et services de qualité. Afin de compenser cela, il faut valoriser la qualité des produits pour rester compétitif. En effet, vendre un produit de qualité peut devenir un avantage concurrentiel car cela peut permettre de se distinguer des autres entreprises et, parfois, de voir les ventes augmenter. Le dirigeant devra donc faire ou non le choix d'une démarche qualité afin d'arbitrer en fonction des coûts supplémentaires et des gains qu'il compte réaliser.
4. Le contrôle des coûts
L'évaluation de la performance se mesure notamment grâce au contrôle des coûts. La méthode des coûts complets (charges directes et indirectes) sert à appréhender le résultat généré par chaque produit de l'entreprise. Ces informations permettent ensuite au dirigeant de prendre la décision de continuer la production à l'identique, d'arrêter celle d'un produit, ou de prendre les mesures nécessaires pour diminuer les coûts et/ou le prix de vente. D'autres méthodes, comme celle du coût spécifique, vont permettre d'évaluer l'intérêt d'une commande supplémentaire.
4.1. La méthode du coût complet
La méthode des coûts complets est fondée sur la distinction à réaliser entre les charges que l'on peut directement rattacher aux produits (charges directes) et celles qui concernent plusieurs produits ou l'ensemble de l'entreprise (charges indirectes).
Exemple : le bois acheté pour fabriquer une table peut être directement attribué à la table. Au contraire, le salaire du comptable de l'entreprise ne peut pas être attribué à tel ou tel produit sans un traitement préalable.
Cette méthode permet l'élaboration d'un coût de revient, nécessaire pour connaître le bénéfice dégagé par chaque produit de l'entreprise.
Pour intégrer les charges indirectes aux différents coûts (c'est-à-dire pour les répartir), on utilisera un tableau de répartition des charges indirectes (valable pour l'ensemble des produits fabriqués par l'entreprise) dans ce que l'on appelle des « centres d'analyse ».
Cette méthode dépasse le simple cadre du contrôle des coûts liés aux opérations de production : elle revêt une dimension stratégique de maintien d'une position concurrentielle en supposant une certaine stabilité de l'environnement. Seulement, elle repose avant tout sur les charges directes. Or, depuis les années 1980, les coûts des entreprises sont en majorité composés de charges indirectes et la méthode est plus adaptée à la production de masse (standardisation des produits) et moins pour la production actuelle (différenciation des produits).
4.2. La méthode du coût spécifique
4.2.1. La distinction entre charge variable et charge fixe
Les charges variables évoluent en fonction du volume d'activité. Leur montant est proportionnel au niveau de l'activité.
Par exemple, les achats de matières premières nécessaires à l'élaboration d'un produit fini (les achats de matières premières augmentent dans les mêmes proportions que les ventes).
Les charges fixes (ou charges de structure) correspondent à des charges indépendantes du volume d'activité.
Par exemple, le loyer d'un entrepôt ne varie pas à la hausse ou à la baisse en fonction du chiffre d'affaires réalisé par l'entreprise.
4.2.2. Le compte de résultat par variabilité et le seuil de rentabilité
Le compte de résultat par variabilité fait apparaître les éléments de chiffre d'affaires, le coût variable, la marge sur coût variable, les charges fixes et le résultat. Il permet de préparer la réalisation du seuil de rentabilité.
Éléments
Montants
En % du CA
Chiffres d'affaires (1)

(1)/(1)
Coût variable (2)


Marge sur coût variable (3)
(3) = (1) – (2)
(3)/(1)
Charges fixes (4)


Résultat (5)
(5) = (3) – (4)
(5)/(1)

Taux de marge sur coût variable : la marge sur coût variable peut être exprimée en pourcentage du chiffre d'affaires puisqu'elle varie dans les mêmes proportions. Taux de marge sur coût variable = marge sur coût variable/chiffre d'affaires.
Le seuil de rentabilité, c'est le niveau de chiffre d'affaires que l'entreprise doit réaliser pour couvrir l'ensemble de ses charges. Il correspond à un niveau d'activité où l'entreprise ne réalise ni bénéfices ni pertes. SR (en valeur) = charges fixes/taux de marge sur coût variable.
4.2.3. La méthode du coût spécifique
La méthode du coût spécifique consiste à imputer à chaque produit les charges directes fixes qui lui sont propres. Elle dégage ainsi une marge sur coûts spécifiques qui doit permettre la couverture des charges fixes indirectes (ou charges fixes communes).

Produit a
Produit b
Chiffre d'affaires (1)


– Charges variables (2)


= Marge sur coût variable (3)
(3a) = (1a) − (2a)
(3b) = (1b) − (2b)
− Charges fixes directes (4)


= Marge sur coût spécifique (5)
(5a) = (3a) – (4a)
(5b) = (3b) – (4b)
Marge sur coût spécifique totale (6)
(6) = (5a)+(5b)
– Charges fixes communes (7)

= Résultat (8)
(8) = (6) – (7)

5. Le développement durable dans les process de production
Les questions du recyclage des déchets générés lors du cycle approvisionnement-production- distribution et de la gestion de la fin de vie des produits constituent des problématiques de plus en plus incontournables dans la détermination des coûts.
Les organisations peuvent s'appuyer sur le concept de product lifecycle management (ou la gestion du cycle de vie d'un produit) afin de répondre en partie à ces problématiques. La gestion du cycle de vie du produit correspond à l'ensemble des processus, des technologies, des logiciels et des méthodes mis en place pour bien gérer le cycle de vie d'un produit. Son but est de permettre aux différentes entités de l'organisation, de la production à la vente, de partager la connaissance des différents stades du cycle de vie d'un produit, de la conception à la vente (voire au recyclage), afin de simplifier la gestion devenue complexe du cycle de vie d'un produit.
À retenir
Le choix stratégique du mode de production concerne les entreprises industrielles et les activités de service. Il dépend le plus souvent de la nature du bien fabriqué ou du service offert. Dans ce dernier cas, il convient de noter que le client ou l'usager participe plus ou moins directement au processus de production. Dans ce cadre, la qualité est un enjeu concurrentiel majeur, elle ne se limite pas à la qualité de production des biens, mais concerne également la qualité des services, y compris celle des services publics. La méthode des coûts complets (charges directes et indirectes) sert à appréhender le résultat généré par chaque produit de l'entreprise. Ces informations permettent ensuite au dirigeant de prendre la décision de continuer la production, de l'arrêter, ou de prendre les mesures nécessaires pour diminuer les coûts et/ou le prix de vente. Cependant, cette méthode prête à controverse : le choix des unités d'œuvre et la proportion de charges indirectes peuvent en limiter l'analyse. D'autres méthodes vont permettre d'évaluer l'intérêt d'une commande supplémentaire.
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