Sujet national, seconde partie, exercice 4, juin 2015

Énoncé

Sujet d'étude : L'Amérique latine
Document 1
Le climat politique d'après-guerre
« Curieusement donc, de nombreux États latino-américains rejoignirent les États-Unis dans leur combat pour la démocratie alors qu'ils étaient régis par des régimes profondément antidémocratiques. […] La victoire des alliés allait néanmoins ôter aux régimes dictatoriaux toute légitimité. […] Entre 1944 et 1946, six pays d'Amérique latine passèrent de la dictature à la démocratie. De leur côté, les régimes démocratiques ou quasi démocratiques se consolidèrent. Même les dictatures les plus fermement installées furent ébranlées par le climat d'après-guerre. […] Il ne fallut que peu d'années pour que soit oubliée l'euphorie démocratique. Pire même, en 1947-1948, la tendance s'inversa du tout au tout. La guerre froide imposait désormais ses dures réalités. Les relations interaméricaines s'organisaient dans le cadre de l'Organisation des États américains (OEA(1)) qui servait de chambre d'enregistrement à l'hégémonie nord-américaine. »
Source : Olivier Dabène, L'Amérique latine à l'époque contemporaine, A. Colin, 2006.

Document 2
Les relations entre l'Amérique latine et les États-Unis
« Depuis le début des années 1990, l'Amérique du Sud n'appartient plus à la zone de sécurité de Washington. Il est vrai qu'elle comprend des États vastes et peuplés (Brésil, Argentine, Colombie), des pays de haut niveau culturel et éducatif (Uruguay, Chili) et que bon nombre d'économies sud-américaines sont davantage tournées vers l'Europe ou les marchés mondiaux que vers les États-Unis.
L'Europe a signé des « accords d'association » avec certains pays (Chili et Mexique) et en négocie d'autres avec des groupes d'États (Mercosur, Communauté andine). La Chine s'intéresse à son tour à l'Amérique latine et y investit. Le tête-à-tête avec les États-Unis a pris fin.
L'Amérique latine, démocratique depuis la chute des dictatures, ne représente ni une menace, ni un enjeu pour Washington. Elle relève désormais d'une approche marchande. Des accords strictement commerciaux comme l'ALENA pour le Mexique reflètent cette nouvelle donne.
C'est pourquoi Washington n'a plus de politique latino-américaine. Les « relations spéciales » semblent bien avoir fait place à des rapports normalisés entre pays voisins de niveau de développement différent. »
Source : D'après l'article d'Alain Rouquié, « La chasse gardée des États-Unis ? », L'Histoire, n° 322 (juillet-août 2007).

Questions
1. D'après le document 1, quelle est l'évolution des régimes politiques d'Amérique latine à la fin des années 1940 ? Quel contexte international peut l'expliquer ?
2. D'après le document 2, quelles relations entretiennent les pays d'Amérique latine et les États-Unis depuis le début des années 1990 ? Quel événement international majeur a contribué à ce changement ?
3. Dans les documents 1 et 2, citez les organisations régionales mises en place dans cette partie du monde. Précisez le rôle de ces organisations.
4. Montrez que les pays d'Amérique latine ne se contentent pas d'un tête-à-tête avec les États-Unis.
(1)Pacte d'assistance mutuelle ou de défense commune renforçant le pacte de Rio signé en 1947 entre les États-Unis et les États d'Amérique latine.

Corrigé

1. Alors que l'Amérique latine a connu une vague de démocratisation au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, les choses changent à la fin des années 1940. Sous l'effet de la guerre froide qui fait craindre à Washington une propagation du communisme dans son « pré carré » américain, des régimes dictatoriaux s'installent un peu partout sur le continent avec la bénédiction des États-Unis. Ceux-ci considèrent ces régimes non démocratiques comme un moindre mal capable de faire rempart au communisme.
2. Depuis les années 1990, les relations entre les États-Unis et l'Amérique latine ont eu tendance à se dépolitiser pour ne plus se concentrer que sur des problématiques économiques. C'est la conséquence directe de la fin de la guerre froide : pour Washington, il ne s'agit plus d'empêcher la diffusion du communisme, qui ne fait plus peur, sur le continent américain, mais de faire des affaires. Une évolution dont témoignent la création de l'ALENA (accord de libre-échange avec le Mexique et le Canada), le projet de zone de libre-échange des Amériques (ZLEA) et, plus récemment, la réconciliation avec Cuba.
3. La plus vieille organisation internationale panaméricaine est l'Organisation des États américains (OEA) dont le rôle est avant tout symbolique : elle n'a aucun pouvoir réel et sert surtout à entériner l'hégémonie étasunienne sur le continent (héritage de la doctrine Monroe). Plus récemment, l'Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) conclu en 1992 est une organisation à vocation uniquement économique qui favorise le libre-échange entre les États-Unis, le Canada et le Mexique. Cette liberté de circulation concerne donc seulement les capitaux et les biens, mais pas les personnes : la frontière entre les États-Unis et le Mexique demeure l'une des plus infranchissables au monde pour les flux migratoires.
4. Si, en vertu de la doctrine Monroe, les États-Unis ont longtemps maintenu l'Amérique latine dans leur dépendance et se sont opposés fermement à toute ingérence extérieure, les choses ont désormais beaucoup changé. De nombreux pays américains n'hésitent plus, comme Cuba au xxe siècle avec l'URSS, à se tourner vers des partenaires économiques ou politiques hors d'Amérique, sans que cela ne suscite l'irritation des États-Unis. On peut citer le cas du Brésil, puissance émergente qui s'est rapprochée au sein du forum des BRICS de la Russie, de l'Inde, de la Chine et de l'Afrique du Sud. Dans ce contexte, la Chine, en quête de matières premières pour ses industries, fait une percée remarquée en Amérique latine, où elle tente de nouer des partenariats économiques et politiques.