Le centre spatial guyanais de Kourou : coopérer pour s'affirmer à l'échelle mondiale

Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, la conquête de l'espace est un enjeu mondial de premier ordre. La guerre froide a été le moteur d'une compétition farouche dans ce domaine entre les États-Unis et l'URSS ainsi que de formes de coopération entre les deux rivaux. Si ces derniers ont occupé le devant de la scène, d'autres acteurs, dont l'Europe et la Chine, n'ont pas été en reste. Le centre spatial guyanais (CSG) de Kourou est à ce jour la troisième base mondiale de lancement (en nombre de lancements). Fruit d'une coopération fructueuse, il permet à la France et à l'Europe de s'intégrer dans la concurrence mondiale du marché de l'espace.
Kourou : une base de lancement de premier ordre
Une localisation déterminante
L'emplacement d'une base spatiale ne peut se faire au hasard et doit répondre à des critères précis. Dans ce domaine, le site guyanais, département français depuis 1946, présente de nombreux avantages. C'est une zone peu sujette aux risques sismiques, ouverte sur l'océan et loin de zones densément peuplées. Le climat guyanais est également favorable puisqu'il n'est pas soumis aux cyclones qui touchent les Caraïbes et le sud-est des États-Unis. Sa topographie vallonnée permet la mise en place des installations nécessaires (antennes, instruments de mesure, etc.) et sa position équatoriale offre un avantage physique majeur. En effet, la rotation de la Terre permet d'offrir une poussée supplémentaire aux fusées, réduisant le carburant nécessaire au décollage (effet de fronde). Ceci permet à la fois des économies importantes, mais aussi la possibilité d'embarquer de plus lourdes charges. C'est pour toutes ces raisons qu'en 1964 la France choisit Kourou pour entrer dans la course spatiale mondiale.
Une coopération multipolaire
C'est le Centre national d'études spatiales (CNES) qui, à la suite de l'indépendance de l'Algérie où il était installé auparavant (sur la base d'Hammaguir), assure la construction du CSG. Opérationnel à partir de 1968, il sert au lancement de fusées Diamant permettant la mise en orbite des premiers satellites français. Mais, en 1973, onze pays européens se regroupent au sein de l'Agence spatiale européenne (ESA) et mettent en œuvre le projet Ariane, premier lanceur européen. La France met alors à disposition le site de Kourou. Financé à hauteur des deux tiers par l'ESA, le site se modernise. En 1979 est lancée la première fusée Ariane. Actuellement, le CNES prend en charge la sécurité et l'entretien du site, l'ESA gère les programmes de lancement et est propriétaire des infrastructures, tandis que l'entreprise ArianeGroup (fusion depuis 2016 des groupes Airbus et Safran) et ses filiales en France et en Allemagne se consacrent aux lanceurs (de la conception à la commercialisation). Les usines de construction sont organisées de façon à fournir de l'emploi et de l'activité à chaque pays membre de l'ESA.
Aujourd'hui, le site de Kourou compte trois bases de lancement : un consacré à Ariane (charges lourdes), un deuxième pour les fusées Vega (petits porteurs) et un dernier pour Soyouz, le lanceur russe, à Kourou depuis 2011.
Un pôle d'excellence au cœur d'un territoire à développer
Si la base de Kourou offre l'image des prouesses technologiques et du rayonnement international de la France et de l'Europe, elle masque une réalité locale plus contrastée. En effet, la population guyanaise est longtemps restée en marge, délaissée par une métropole plus attentive au CSG qu'au reste du territoire. Le chômage guyanais est deux fois supérieur à celui de la métropole (il atteint plus de 50 % chez les jeunes de moins de 25 ans) et le taux de pauvreté est de plus de 40 % contre 14 % en métropole. Pourtant, le spatial peut être porteur de développement. Il génère 15 % du PIB de la Guyane et offre des emplois directs ou indirects, mais trop souvent réservés à la zone de Kourou. Les Guyanais réclament entre autres une vraie politique de valorisation touristique qui ne se limite pas au site, le développement d'une offre éducative d'excellence ainsi que la mise à disposition de technologies de télécommunications qui font cruellement défaut dans ce vaste territoire marqué par l'éparpillement des villages. Ce sont autant d'axes de travail pour la Mission Guyane (2000) et la délégation Espace pour la Guyane (2020) mises en place par le CNES. Il s'agit de diversifier l'économie guyanaise et l'ouvrir à d'autres projets que ceux concernant le domaine spatial. Ainsi, si les PME locales sont impliquées dans la gestion du CSG, le CNES soutient désormais des projets d'entreprises hors spatial (alimentation, BTP, tourisme), attribue des bourses d'études chaque année et participe au développement de l'IUT créé à Kourou en 1988. Il met également en valeur le patrimoine naturel et historique des îles du Salut dont il est propriétaire. L'association Guyane Connect s'est fixé comme objectif la mise en place de projets de développement des réseaux.
Exercice n°1Exercice n°2Exercice n°3Exercice n°4Exercice n°5Exercice n°6
Le centre spatial au cœur de la mondialisation
Une concurrence internationale féroce
Depuis le début de l'aventure spatiale, le leader mondial a été et reste incontestablement les États-Unis. La base de Cap Canaveral est la première en nombre de lancements d'engins spatiaux (16 en 2019 pour un total de 21) et connaît un renouveau exceptionnel grâce à l'arrivée de SpaceX, l'entreprise d'Elon Musk. L'intervention du secteur privé dans le domaine spatial est inédite et prend une dimension de plus en plus cruciale. SpaceX rouvre la voie aux vols habités et innove avec la conception de fusées réutilisables.
Talonnant les États-Unis, la Chine est en train de gagner le premier rang des puissances spatiales. Avec cinq bases de lancement, elle détient le record du nombre de lancements en 2019 (32 lancements réussis). Outre ses programmes de satellites civils et militaires (un cinquième des satellites mondiaux), la Chine vise la présence humaine sur la Lune et l'éventuelle exploitation de ses matières premières et le voyage habité vers Mars.
Après avoir longtemps été le rival incontournable des États-Unis, la Russie est désormais au second plan. En 2019, elle les dépasse en nombre de lancements (25), mais est très en retrait en nombre de satellites mis en orbite. La base traditionnelle de Baïkonour perd peu à peu de sa puissance. Alors qu'elle était le seul port assurant la liaison avec la station spatiale internationale (ISS), l'arrivée de SpaceX lui fait perdre ce monopole. Du fait de la situation géopolitique de la base (dans l'ancienne république soviétique du Kazakhstan devenue indépendante), la Russie lui préfère désormais celle de Plessetsk.
L'Inde enfin émerge de manière remarquée dans la concurrence. Premier pays asiatique à mettre en orbite une sonde autour de Mars, elle détient également le record du nombre de satellites à bord d'un seul lanceur. L'organisation indienne de recherche spatiale (ISRO) commercialise ses vols depuis 1999 et se spécialise, sur sa base de Satish Dhawan, dans le transport de microsatellites, aussi bien pour les pays de la zone indopacifique que pour les pays européens et américains, grâce à des coûts très réduits.
Des stratégies coopératives au service de l'avenir
Dans ce contexte de forte concurrence, l'ESA a fort à faire pour conserver sa quatrième place après la Chine, les États-Unis et la Russie. Avec seulement huit lancers en 2019, elle souffre en particulier d'une faible demande institutionnelle de la part des pays européens. En effet, nombreux sont ceux qui se tournent vers d'autres opérateurs (SpaceX, ISRO en particulier). Elle doit donc trouver d'autres partenariats, comme c'est déjà le cas avec le russe Soyouz. Elle développe sa stratégie de petits porteurs (en forte croissance) avec les fusées Vega, mais aussi la réduction des coûts pour le transport des grosses charges. Ainsi Ariane 6, en combinant la technologie des propulseurs Vega et une diminution des temps de préparation avant le lancement, devrait être moitié moins coûteuse qu'Ariane 5. L'ESA investit également dans Prométhée, un moteur réutilisable dont devraient être dotés les lanceurs européens à partir de 2030. Enfin, dans le domaine de l'exploration spatiale, l'ESA a réalisé avec succès depuis Kourou le lancement de la sonde Rosetta (analyse de la comète Tchouri) et collabore avec Roscosmos (l'agence spatiale russe) pour la mission ExoMars, avec la mise en orbite d'un satellite destiné à l'analyse de l'atmosphère martienne et l'envoi en 2022 d'une plateforme russe et d'un véhicule européen sur la planète rouge.
Exercice n°7Exercice n°8Exercice n°9
Exercice n°1
En quelle année a été lancée la première fusée Ariane ?
Cochez la bonne réponse.
1946
1964
1973
1979
2016
La Guyane, département français en 1946, accueille le CNES à partir de 1964. Après la création de l'Agence spatiale européenne en 1973, la première fusée Ariane décolle de la base de Kourou en 1979.
Exercice n°2
En quelle année a été créée l'Agence spatiale européenne ?
Cochez la bonne réponse.
1946
1964
1973
1979
2016
La Guyane, département français en 1946, accueille le CNES à partir de 1964. Après la création de l'Agence spatiale européenne en 1973, la première fusée Ariane décolle de la base de Kourou en 1979.
Exercice n°3
Dans quel département français se trouve la base de Kourou ?
Cochez la bonne réponse.
La Guadeloupe
La Martinique
La Réunion
L'Algérie
La Guyane
La première base spatiale française se situait à Hammaguir, en Algérie. Mais à la suite de l'indépendance de l'Algérie en 1962, la France est contrainte de quitter la base. Le CNES choisit alors la Guyane, département français depuis 1946, pour sa localisation particulièrement favorable.
Exercice n°4
Que signifie l'acronyme CNES ?
Cochez la bonne réponse.
Centre national européen spatial
Centre national d'études spatiales
Centre national d'études scientifiques
Centre national d'envol spatial
Fondé en 1961 par le général de Gaulle en plein contexte de guerre froide pour assurer la position internationale française dans le domaine spatial, le Centre national d'études spatiales est encore aujourd'hui la première agence spatiale européenne. Il est propriétaire des terrains de Kourou et en assure la sécurité et l'entretien.
Exercice n°5
Quels sont les axes de développement local mis en place par la Mission Guyane ?
Cochez la bonne réponse.
Soutenir des associations caritatives pour venir en aide aux chômeurs.
Créer de nouveaux sites de lancement, attirer les investisseurs internationaux.
Créer des campus d'élite pour former des ingénieurs dans le domaine spatial.
Soutenir les PME, l'éducation, l'équipement des réseaux.
La Guyane est un département qui connaît une importante crise économique et sociale. Le domaine spatial y assure 15 % du PIB, qui profitent peu à la population. Le CNES s'est donc vu attribuer une mission de développement local, qui passe par l'attribution de marchés aux PME, la promotion des études universitaires par l'attribution de bourses et le développement de filières scientifiques en particulier au sein d'un IUT, la sensibilisation des jeunes élèves par la visite des installations du CSG et la mise à disposition des technologies de pointe utilisées dans le domaine spatial pour améliorer les réseaux de communication.
Exercice n°6
Quels acteurs internationaux sont présents à Kourou ?
Cochez la bonne réponse.
Le CNES, Ariane, Soyouz.
L'ESA, Ariane, Soyouz.
La NASA, le CNES, Soyouz, l'ESA.
Le CNES, l'ESA, ArianeGroup, Soyouz.
Le CNES est l'organisme fondateur de la base de Kourou. Après la création de l'Agence spatiale européenne en 1973, elle s'implante à son tour sur le site du CSG et, depuis 2016, les entreprises d'ArianeGroup sont chargées du développement (de la conception à la commercialisation) des lanceurs qui y décollent. Enfin, le lanceur russe Soyouz décolle du CSG (où il a une base dédiée) depuis 2011.
Exercice n°7
Quel est le nom de la principale base de lancement américaine ?
Cochez la bonne réponse.
Baïkonour
Plessetsk
Cap Canaveral
Satish Dhawan Space Center
CSG
Créée en 1950, la Cap Canaveral Air Force Station (CCAFS) se situe en Floride, au sud-est des États-Unis. Elle est la première base de lancement spatial américaine.
Exercice n°8
Quel est le premier pays en nombre de lancements en 2019 ?
Cochez la bonne réponse.
Les États-Unis
La Russie
La Chine
L'Inde
L'Europe
Avec 32 lancements réussis en 2019, la Chine est le premier lanceur mondial après la Russie (25 lancements) et les États-Unis (21 lancements).
Exercice n°9
Quel opérateur privé a inventé la fusée réutilisable ?
Cochez la bonne réponse.
ArianeX
SpaceX
AsterX
Prométhée
Ariane 6
La société SpaceX, créée par Elon Musk, est le premier opérateur spatial privé avec sa fusée en partie réutilisable Falcon 9. Le 14 mars 2021, l'une d'entre elles a effectué son neuvième voyage de mise en orbite de satellites. C'était une première mondiale.