La maîtrise de l'eau


Fiche

À quels usages l'eau douce est-elle destinée ? Quels sont les aménagements créés par l'Homme pour l'exploiter ? Et quelles sont les conséquences spatiales de l'utilisation de ce bien si précieux ?
I. Le premier consommateur : l'agriculture
• Même si la ville et l'industrie, qui se développent rapidement en ce xxie siècle, voient leurs besoins en eau croître régulièrement, c'est bien l'agriculture qui est la plus grosse consommatrice de la ressource : 70 % ! L'agriculture irriguée, par l'apport artificiel en eau qu'elle réalise, représente à elle seule largement plus de la moitié des prélèvements, et ceux-ci peuvent monter jusqu'à 90 % dans les États où l'irrigation est fortement développée, notamment depuis l'avènement de la Révolution verte, dont l'irrigation fut une des armes maîtresses.
• La planète compte environ 300 millions d'hectares de terres irriguées. En Chine et en Inde, par exemple, où les techniques de la Révolution verte furent assez largement diffusées, les terres irriguées comptent pour 55 millions d'hectares chacune, soit le tiers des terres irriguées mondiales. Les prélèvements ont donc fortement augmenté depuis les années 1960. Certains pays, parmi les moins bien dotés, prélèvent près de 100 % de la ressource annuelle : c'est le cas de presque toute l'Afrique du nord et du Moyen-Orient. On puise alors dans les réserves fossiles, de l'eau héritée de périodes plus humides, stockées dans des couches géologiques profondes et qui ne se renouvelleront pas.
II. Des aménagements spécifiques
• Cela fait bien longtemps que les sociétés humaines ont construit des équipements destinés à utiliser l'eau, que ce soit pour les transports (Grand Canal chinois, de Pékin à Hangzhou), pour l'approvisionnement des villes (aqueducs romains, comme le pont du Gard) ou l'irrigation (qanat en Perse, foggara au Maghreb, certains remontant au ier millénaire av. J.-C.). Le premier barrage daterait du ive millénaire av. J.-C. ! Depuis deux siècles, des aménagements plus importants encore, et surtout beaucoup plus nombreux, ont vu le jour.
• Des barrages géants ont été construits, comme celui d'Itaipu, entre le Brésil et le Paraguay, ou celui des Trois-Gorges en Chine. Ces ouvrages d'art ont des fonctions multiples : ils régulent le débit des fleuves, évitant ainsi les crues dévastatrices en aval ; ils mettent à disposition de l'eau pour l'agriculture irriguée ; ils produisent de l'hydroélectricité (une énergie renouvelable : Itaipu produit 25 % de l'énergie électrique du Brésil à lui seul !) ; parfois même ils peuvent être utilisés pour le tourisme, leur plan d'eau permettant les activités nautiques. Toutefois, les impacts environnementaux sont importants : leur bassin de retenue noie la zone environnante (le réservoir des Trois-Gorges s'étend sur plus de 1 000 km2 !) et oblige à déplacer populations et villages ; les sédiments s'accumulent dans les réservoirs, diminuant progressivement leur capacité ; le barrage coupe le cours d'eau, modifiant l'écosystème.
• D'autres aménagements spécifiques existent : usines de dessalement de l'eau de mer ou de retraitement des eaux usées rejetées par les villes ou les industries.
III. Des paysages spécifiques
• La maîtrise de l'eau est à l'origine de paysages spécifiques parmi les plus spectaculaires au monde. Les plus anciens sont sans doute les rizières irriguées des deltas d'Asie orientale. Parfois étagées jusque sur le flanc des montagnes voisines, ces rizières occupent tout l'espace, devenu presque géométrique, où l'acheminement de l'eau et son contrôle deviennent un art à présent plusieurs fois millénaire.
• Dès le Moyen-Âge, les Hollandais ont su drainer l'eau, la rejeter et constituer des polders, espaces gagnés sur la mer, puis mis en culture, voire urbanisés. Leur expérience en la matière était si réputée que la France du xviie siècle les invita à assécher le marais Vernier, en Normandie.
• Enfin, dernier exemple récent de ces paysages créés par l'alliance de l'eau et de l'Homme, ces cercles géants, visibles du ciel, qui tracent d'immenses taches vertes dans les déserts du Maroc, des États-Unis ou d'Arabie Saoudite. Ces cercles sont créés par d'immenses rampes d'aspersion axiale, puisant dans des nappes d'eau fossiles. C'est ainsi que l'Arabie est parvenue à produire le blé le plus cher du monde…
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