Texte de Jean Anouilh, analyse de l'image (sujet inédit)

Énoncé

L'Auteur(1) et Ardèle sont mari et femme. L'Auteur veut obtenir des éclaircissements à propos d'une lettre adressée à sa femme.
L'AUTEUR
Un mot encore. Cette lettre n'était pas de ta sœur.
ARDÈLE
Dire que tu fouilles mes tiroirs ! J'ai honte.
L'AUTEUR
Ta sœur t'aime, c'est entendu, mais au point de t'appeler mon amour.
ARDÈLE
Ce n'est pas assez de moi. Salis ma sœur !
L'AUTEUR
Je ne salis pas ta sœur. Je constate. Ta sœur n'a pas une culture écrasante mais, enfin, elle met l'orthographe. Elle n'aurait pas systématiquement oublié les e muets à la fin des participes passés.
ARDÈLE
Tu vois à quels détails tu t'attaches !
L'AUTEUR
Cette lettre était d'un homme.
ARDÈLE
Tu es ignoble. Veux-tu me permettre de te poser une question ?
L'AUTEUR
Pose.
ARDÈLE
Et si tout était de ta faute ?
L'AUTEUR
ricane sombrement – ! Ah !
ARDÈLE
Qu'est-ce que tu fais ?
L'AUTEUR
Je ricane.
ARDÈLE
Quelle horreur ! Je te trompe et tu ricanes. Tu n'es même pas capable de souffrir. Je t'ai donné ma jeunesse et tu fouilles dans mes tiroirs.
L'AUTEUR
Cette lettre était par terre. Dans les cabinets.
ARDÈLE
Tu fouilles dans les cabinets ! Dans deux heures je serai partie. Je retourne chez ma mère.
L'AUTEUR
Elle est morte. En 1922.
ARDÈLE
Essaie, essaie de me rendre encore plus triste en me rappelant que ma pauvre maman est morte et que je n'ai plus rien au monde. Elle a laissé une maison, tout de même, 122, rue des Retaillons à Saint-Malo. Une maison où habite ma sœur illettrée. Je vais chez elle.
L'AUTEUR
C'est parfait.
ARDÈLE
Naturellement, tu triomphes. Tu vas pouvoir enfin me tromper. Il y a douze ans que tu attendais ce jour, et tu t'es arrangé pour que ce soit moi qui aie l'air d'avoir tort.
L'AUTEUR
hurle soudain – Mais enfin, sacrebleu, de qui était cette lettre ?
ARDÈLE
d'un mépris de marbre – Qu'est-ce que cela peut bien être ? Ma sœur ne sait pas écrire.

Jean Anouilh, Épisode de la vie d'un auteur, éditions La Table ronde, 1948.
Travail sur le texte littéraire
Compréhension et compétences d'interprétation
1. 
À quel genre appartient ce texte ? Justifiez votre réponse à l'aide de deux indices.
Observez le texte, le « dessin » qu'il forme sur la page, le paratexte. Interrogez-vous : ce dialogue est-il écrit en vers ou en prose ? Est-il composé de répliques ? Celles-ci sont-elles précédées du nom du personnage écrit en majuscules ou de guillemets ? Repérez-vous des verbes introducteurs, des didascalies ? Ce dialogue est-il tiré d'un roman ou d'une pièce de théâtre ?
2. 
Résumez le texte en une ou deux phrases.
Si vous deviez résumer le texte à un ami, que lui diriez-vous ? Interrogez-vous : dans ce dialogue, quelle est la situation initiale ? Quel est l'élément perturbateur ? Quelle est la situation finale ?
3. 
D'après Ardèle, par qui la lettre a-t-elle été écrite ? Selon vous, le mari est-il du même avis ? Justifiez votre réponse en citant le texte.
Relevez des mots ou expressions qui précisent l'identité de l'auteur de la lettre selon Ardèle. Interrogez-vous : le mari est-il d'accord concernant l'identité de l'auteur de la lettre ? Repérez et relevez des expressions pour expliquer et justifier votre réponse.
4. 
Selon vous, qui domine la scène au début ? Qui domine la scène à la fin ? Justifiez votre réponse.
Relevez des mots ou expressions qui soulignent l'identité du personnage qui domine l'autre et mène le jeu au début de la scène. Est-ce le même qui domine l'autre à la fin de la scène ?
5. 
Quelles sont les différentes stratégies employées par Ardèle pour résister à son mari ? Identifiez-en deux et expliquez-les en vous appuyant sur des passages précis du texte.
Mobilisez vos connaissances : la « stratégie », c'est l'art de manœuvrer habilement pour atteindre un but. Pensez aussi aux jeux vidéo. Interrogez-vous : comment Ardèle fait-elle pour résister à son mari ? Citez des passages du texte pour justifier votre réponse.
6. 
« Je t'ai donné ma jeunesse et tu fouilles dans mes tiroirs. »
a) Selon vous, que signifie l'expression « Je t'ai donné ma jeunesse » ?
b) En quoi cette réplique est-elle comique ?
a) Relisez attentivement le passage qui contient cette phrase. Interrogez-vous : quel sens a ici le verbe donner ? De quoi Ardèle accuse-t-elle son mari ?
b) Observez les deux propositions coordonnées par « et ». Interrogez-vous : pourquoi cette réplique est-elle comique ? Quel est le ressort du comique dans cette expression ?
7. 
Lorsque Ardèle affirme qu'elle souhaite rentrer chez sa mère, que cela signifie-t-il ? Selon vous, est-ce que le mari le comprend de la même manière ? Expliquez.
Relisez attentivement le passage qui contient cette phrase. Interrogez-vous : que souhaite dire Ardèle en réalité ? En vous aidant du contexte, reformulez cette phrase avec vos propres mots. Repérez des mots ou expressions qui montrent que le mari comprend ce que dit sa femme ou, au contraire, qu'il interprète mal ses propos.
8. 
Comment interprétez-vous la dernière réplique d'Ardèle ? Expliquez.
Interrogez-vous : que fait Ardèle lorsqu'elle affirme : « Qu'est-ce que cela peut bien être ? Ma sœur ne sait pas écrire. » ? Quelle est sa nouvelle stratégie ?
9. 
En quoi cette scène est-elle comique ? Fait-elle appel au comique de langage, de geste, de caractère, de situation ? Développez votre réponse en vous appuyant sur l'ensemble du texte.
Mobilisez vos connaissances sur les différents types de comique proposés dans la question. Pensez aussi aux comédies étudiées ou lues au collège, aux films et séries comiques, aux sketches des humoristes.
Grammaire et compétences linguistiques
1. 
« Salis ma sœur ! »
a) Quel est le mode du verbe ?
b) Expliquez ce qu'Ardèle veut dire.
a) Observez la forme verbe. Interrogez-vous : à quel mode un verbe est-il conjugué seul, sans pronom ? Identifiez aussi le type de la phrase.
b) Mobilisez vos connaissances : un mot peut être polysémique (avoir un sens propre et un sens figuré par exemple). Interrogez-vous : dans quel sens est employé ici le verbe salir ?
2. 
« L'AUTEUR. - Pose […] L'AUTEUR. - Je ricane. »
a) Quel est le type de phrase employé majoritairement par le mari ? Pourquoi ?
b) Quelle est donc sa stratégie pour obtenir des informations ?
a) Interrogez-vous : quel type de phrase reconnaissez-vous ? Observez la ponctuation. Quel signe de ponctuation en fin de phrase revient souvent dans les paroles du mari ?
b) Relisez la réponse à la question précédente. Interrogez-vous : pourquoi le mari agit-il ainsi ? Que souhaite-t-il montrer à sa femme ? Quel est son objectif en employant ce type de phrase ?
3. 
« Naturellement, tu triomphes. Tu vas pouvoir enfin me tromper. Il y a douze ans que tu attendais ce jour, et tu t'es arrangé pour que ce soit moi qui aie l'air d'avoir tort. »
Réécrivez ce passage en remplaçant « tu » par « vous » et « je » par « nous ». Vous ferez toutes les transformations nécessaires.
  • Soulignez les pronoms personnels sujets « tu » qui désignent le mari et les verbes dont « tu » est sujet. Transformez-les en « vous » et modifiez les terminaisons des verbes (accord). Attention à l'accord du participe passé employé avec être !
  • Soulignez les pronoms personnels de la 2e personne du singulier qui désignent le mari (« tu ») qui accompagnent les verbes pronominaux et transformez-les en « vous ».
  • Soulignez les pronoms personnels sujets et compléments d'objet qui désignent Ardèle (« je », « moi ») et transformez-les en « nous ».
  • Soulignez le verbe dont « nous » est sujet et modifiez la terminaison (accord). Attention ! Ce verbe est au subjonctif présent.
Dictée
« Un décor aussi peu réaliste que possible, on doit distinguer tout de même le bureau de l'Auteur au centre, trois portes, le vestibule côté jardin, avec une amorce d'escalier et la porte d'entrée.
C'est le matin, en scène dans le bureau, l'Auteur et Ardèle en robes de chambre. Ils sont l'un en face de l'autre très remontés ; ils crient tapant à tour de rôle sur le bureau. Tous les personnages de ce petit acte sont réalistes, les femmes sont charmantes mais – ce détail de mise en scène est indispensable – tout le monde porte des faux nez. »
Jean Anouilh, Épisode de la vie d'un auteur, éditions La Table ronde, 1948.

Rédaction
Sujet d'imagination
Cette scène de dispute est interrompue par l'entrée de la sœur d'Ardèle. L'Auteur et Ardèle recherchent chacun son soutien.
Vous écrirez cette nouvelle scène en respectant les caractéristiques du genre théâtral et en conservant le registre comique.
Procéder par étapes
Étape 1. Lisez attentivement le sujet. Repérez et soulignez les mots-clés : « la dispute est interrompue par l'entrée de la sœur d'Ardèle », « L'Auteur et Ardèle recherchent chacun son soutien ». Le thème est la dispute entre un mari et sa femme au sujet d'une possible infidélité.
Étape 2. Repérez et encadrez la forme du texte à produire : « cette nouvelle scène », « les caractéristiques du genre théâtral », « le registre comique ». Il faut donc respecter :
  • la disposition du dialogue de théâtre : le nom du personnage qui parle précède les paroles ; les éventuelles didascalies sont en italique (écriture penchée) ; suivez la présentation du texte de Jean Anouilh ;
  • le registre comique : comique de situation (dispute), de caractère (femme adultère, mari jaloux, sœur timide ou autoritaire), de mots, de geste ;
  • les temps du dialogue théâtral sont articulés sur le présent de l'énonciation : imparfait, passé composé, futur, etc. ;
  • le nombre de lignes imposé : une cinquantaine.
Étape 3. Trouvez des idées : pourquoi la sœur d'Ardèle apparaît-elle sur scène ? Que lui dit Ardèle pour s'assurer de son soutien ? Que lui dit l'Auteur pour s'assurer de son soutien ? Comment réagit la sœur d'Ardèle ? Que fait-elle ? Que dit-elle ? Comment se comporte-t elle ? Est-elle timide, autoritaire, embarrassée, etc. ? Quelles sont les différentes réactions d'Ardèle et de l'auteur ? Les sœurs se soutiennent-elles ? Quels mensonges inventent-elles ? Le mari est-il dupe de leurs mensonges ? Etc.
Étape 4. Établissez le plan de votre scène.
  • La sœur d'Ardèle entre sur scène. L'Auteur cherche à s'assurer son soutien en lui résumant la situation. Il argumente pour dénoncer l'infidélité d'Ardèle, pour rappeler qu'il est un bon mari, etc.
  • Ardèle cherche à s'assurer le soutien de sa sœur en la prenant à témoin de son mariage raté, de ses malheurs, etc.
  • Un personnage sort de scène pour mettre un terme à la dispute : lequel ? que dit-il ? comment réagissent les deux autres ?
Étape 5. Rédigez en matérialisant les répliques des personnages (retour à la ligne) et les didascalies.
Étape 6. Relisez-vous en corrigeant d'éventuelles erreurs (orthographe, syntaxe, ponctuation, niveau de langue).
Sujet de réflexion
Le mariage est une institution qui évolue beaucoup. Par ailleurs, des statistiques montrent que le nombre de divorces augmente régulièrement.
Selon vous, la vie moderne actuelle fragilise-t-elle le bonheur des couples mariés ?
Procéder par étapes
Étape 1. Lisez attentivement le sujet et soulignez les mots-clés qui évoquent le thème du sujet : « Le mariage est une institution qui évolue beaucoup », « le nombre de divorces augmente », « la vie moderne fragilise-t elle le bonheur des couples mariés ». Le thème du sujet est le mariage dans notre société.
Étape 2. Repérez la forme du texte à écrire : « un développement organisé ». Comme il s'agit d'un sujet de réflexion, c'est un texte argumentatif (« vous exprimerez votre avis »), composé d'arguments et d'exemples (« trois arguments illustrés d'exemples ») qui est attendu. Il faut respecter :
  • le genre argumentatif : le développement organisé, avec sa progression, ses analyses et ses arguments, ses exemples précis ;
  • le temps de l'argumentation : le présent et les temps qui s'articulent avec lui ;
  • la composition en parties et paragraphes (introduction, développement, conclusion) ;
  • la limite imposée : « une cinquantaine de lignes ».
Étape 3. Indiquez la thèse que vous défendez : la vie moderne fragilise le bonheur des couples mariés : oui/non. Trouvez des arguments : vitesse, agitation, stress, travail du mari et de la femme, fatigue, loisirs, moyens de communication (Internet, Twitter, sites de rencontres, etc.), conception du mariage et de l'amour, difficulté à vivre en couple toute une vie, désir ou besoin de changement (génération « zapping »), causes des divorces, déresponsabilisation de l'homme et de la femme, peur de l'engagement, volonté de liberté, etc.
Étape 4. Établissez le plan de votre travail d'écriture.
  • L'introduction expose le problème et introduit le thème (le mariage dans notre société). Partez, par exemple, de l'idée que la vie moderne fragilise le bonheur des couples mariés. Le plus souvent, on rédige l'introduction au présent.
  • Le développement de l'argumentation devra comporter deux ou trois parties. Vous articulerez votre réflexion, par exemple, autour de l'idée que la vie actuelle fragilise le bonheur des couples mariés. Pour chacune des trois parties, il faudra trouver au moins un argument et l'expliciter à l'aide d'un exemple.
Tout comme dans l'introduction, le temps utilisé sera le présent.
Il faudra veiller à utiliser :
– des modalisateurs de certitude (il est évident, il est certain, assurément, incontestablement…) ;
– des connecteurs logiques (en premier lieu, de plus, ensuite, enfin, en effet, dès lors, de fait, par conséquent, donc…) ;
– des phrases de type exclamatif et des questions rhétoriques pour souligner votre désir de convaincre, des hyperboles pour montrer votre détermination.
  • La conclusion fait un bilan sur le sujet et insiste par exemple sur le fait que la vie moderne, avec la crise économique et morale, menacent sans cesse le bonheur des couples mariés, et que l'évolution de notre société n'est guère favorable.
Étape 5. Relisez attentivement votre devoir et corrigez les éventuelles erreurs (orthographe, ponctuation, accords).
(1)L'Auteur est le nom du personnage, et prend une majuscule, tandis que l'auteur avec une minuscule désigne Jean Anouilh.

Corrigé

Travail sur le texte littéraire
Compréhension et compétences d'interprétation
1. Ce texte appartient au théâtre : le nom des personnages qui dialoguent est écrit en majuscules au début de chaque réplique. L'auteur utilise des didascalies, en italique, pour préciser le ton : « ricane sombrement » ou le sentiment : « d'un mépris de marbre ».
2. L'Auteur a découvert une lettre adressée à sa femme. Il l'interroge sur l'identité de l'auteur de cette lettre. Elle prétend que c'est une lettre de sa sœur tandis que l'Auteur est persuadé que c'est une lettre de son amant.
3. D'après Ardèle, la lettre a été écrite par sa sœur. D'après le mari, la lettre a été écrite par un homme, sans doute l'amant de sa femme. Les participes passés sont accordés au masculin et la formule d'ouverture de la lettre à Ardèle est « mon amour ».
4. Au début de la scène, le mari domine la situation : il affirme que la lettre n'a pas été écrite par la sœur de sa femme (phrases déclaratives). À la fin, Ardèle domine la situation car son mari pose maintenant une question sur l'auteur de cette lettre (phrase interrogative). Il semble ne plus être certain, sa femme le fait douter.
5. Ardèle accuse son mari de salir sa sœur, de tenir des propos malveillants à son sujet : « Salis ma sœur ». Ensuite, elle accuse son mari de fouiller dans ses tiroirs, puis dans les cabinets. Ardèle tente de mettre son mari en accusation afin d'échapper à ses reproches et à ses questions, elle cherche à apparaître comme une sorte de victime. Elle essaie de renverser les rôles, puisqu'à la fin elle lui dit qu'il triomphe et qu'il va enfin pouvoir la tromper tranquillement.
6. 
a) Ardèle, lorsqu'elle prononce cette phrase, explique qu'elle s'est mariée avec l'Auteur et qu'elle a sacrifié sa jeunesse. Malgré tout, l'Auteur se comporte de manière mesquine : il fouille dans ses tiroirs.
b) Le comique naît du décalage entre les deux propositions : le sacrifice de la jeunesse d'Ardèle pour son mari et le résultat obtenu : il fouille dans ses tiroirs. L'effet repose donc sur l'opposition entre un grand sentiment d'un côté et un geste mesquin de l'autre.
7. Pour Ardèle, cette expression signifie qu'elle quitte son mari, qu'elle retourne dans la maison de sa mère, dont elle rappelle l'adresse. L'Auteur, lui, prend cette expression dans son sens propre : Ardèle retourne auprès de sa mère ; c'est pourquoi il lui rappelle qu'elle est morte en 1922.
8. Quand son mari la questionne une dernière fois sur l'identité de l'auteur de la lettre, Ardèle avoue que sa sœur ne sait pas écrire et qu'elle ne peut donc pas être l'auteur de cette lettre. Ardèle laisse planer le doute sur sa prétendue infidélité puisqu'elle refuse toujours de révéler l'identité de l'auteur de la lettre.
9. Cette scène relève de plusieurs types de comique : le comique de situation (le mari découvrant que sa femme a un amant est un thème fréquent du théâtre comique, du théâtre de boulevard, du vaudeville), le comique de langage (le décalage entre les sens de certaines expressions), le comique de geste (le ricanement et le hurlement du mari).
Grammaire et compétences linguistiques
1. 
a) Le verbe salir est au mode impératif.
b) « Ce n'est pas assez de me salir, il faut que tu salisses aussi ma sœur. » Ardèle reproche à son mari de porter des accusations calomnieuses contre elle et sa sœur.
2. 
a) Le mari emploie majoritairement des phrases déclaratives pour affirmer ses certitudes, ses informations.
b) Grâce à cette stratégie, le mari veut montrer à Ardèle qu'il est au courant de son infidélité ; il cherche à se montrer calme et objectif en énonçant simplement des faits réels, afin d'obliger sa femme à dire la vérité sur cette lettre.
3. Naturellement, vous triomphez. Vous allez pouvoir enfin nous tromper. Il y a douze ans que vous attendiez ce jour et vous vous êtes arrangés pour que ce soit nous qui ayons l'air d'avoir tort.
Dictée
Ce sont des didascalies pour la pièce de Jean Anouilh : le temps est le présent de l'indicatif. Cet extrait fournit des indications sur la mise en scène.
Les verbes s'accordent avec leur sujet singulier ou pluriel : « (on) doit », « (c') est », « (ils) sont », « (ils) crient », « (tous les personnages) sont », « (les femmes) sont », « (ce détail) est », « (tout le monde) porte ».
Le participe présent « tapant » est invariable même s'il se rapporte au pronom personnel pluriel « ils ».
Le verbedistinguer est à l'infinitif car il dépend du verbe devoir.
Les adjectifs et participes s'accordent en genre et en nombre avec le nom ou le pronom qu'ils qualifient : « un décor… réaliste », « ce petit acte », « des faux nez ».
Les adjectifs et participes s'accordent avec le sujet quand ils sont attributs : « ils sont… très remontés » ; « tous les personnages… sont réalistes » ; « les femmes sont charmantes » ; « ce détail… est indispensable ».
Les déterminants indiquent souvent le nombre (singulier ou pluriel) du nom ou du groupe nominal qu'ils introduisent : «  un décor », «  le bureau », «  le vestibule », «  une amorce », «  la porte », «  le matin », «  ce petit acte », «  ce détail », «  tout le monde » ; «  trois portes », «  tous les personnages », «  les femmes », «  des faux nez ».
Plusieurs accords peuvent être sources d'erreur : « côté jardin » (du côté du jardin),«  une amorce d'escalier » (l'amorce d'un escalier), « la porte d'entrée » (une seule entrée), « en robes de chambre » (les personnages portent chacun une robe quand ils sont dans leur chambre), « ce détail de mise en scène » (un détail de la mise en scène).
Attention à quelques homonymes : « peu » (adverbe) / peux, peut (pouvoir) ; « c'est » (cela est) / ses, ces (déterminants), s'est (verbe pronominal : s'est souvenu, s'est servi) ; « scène » (de théâtre) / Seine (fleuve), seine ou senne (filet de pêche) ; « ce » (déterminant démonstratif devant un nom ou un adjectif suivi d'un nom) / se (pronom personnel devant un verbe).
Rédaction
Sujet d'imagination
LA SŒUR (timidement)
Bonjour. J'ai sonné, j'ai frappé mais vous n'avez pas entendu sans doute. Je crois que je tombe plutôt mal…
L'AUTEUR
Oh que non ! Tu tombes très bien au contraire ! Il était question de toi et…
ARDÈLE (interrompant son mari)
Ah non, laisse ma sœur ! Je t'interdis de la mêler à nos histoires.
L'AUTEUR (interrompant son mari)
Pourquoi ? C'est elle qui t'a écrit cette lettre bourrée de fautes d'orthographe. Non ?
ARDÈLE
Ma petite sœur chérie, ne l'écoute pas ! Tu connais sa jalousie, n'est-ce pas ? Dis-lui, toi, que je suis une épouse fidèle, que je lui ai donné les plus belles années de ma jeunesse, que j'ai tout sacrifié pour lui : ma carrière, mes amis… Je me suis souvent confiée à toi quand je me sentais incomprise et délaissée.
LA SŒUR (embarrassée)
Euh… oui… non… mais de quelle lettre vous parlez ?
L'AUTEUR
Je le savais ! Eh bien, ta sœur a un amant ! Mon épouse si fidèle me trompe ! Toi, tu dois savoir quelque chose ; entre sœurs, on se fait des confidences. Franchement, dis-moi, n'ai-je pas été pour elle un mari attentionné, tendre, prévenant ? Depuis douze ans, ne l'ai-je pas couverte de cadeaux pour ses anniversaires, pour la Saint-Valentin ? Est-ce que je mérite d'être traité ainsi ? Allez, je t'écoute. Qui est-ce ? Je le connais ? Depuis quand a-t-elle cette liaison ?
LA SŒUR (de plus en plus embarrassée)
Ardèle ? Un amant ? Alors c'est pour ça que vous vous disputiez ?
L'AUTEUR
Oui. Et pour ne pas avouer son infidélité, elle m'accuse et me rend responsable. Ce serait de ma faute si elle me trompe. Là, tu as une idée de sa mauvaise foi, de sa duplicité. Après douze ans, elle révèle enfin sa vraie nature. Mais, toi, tu connais son caractère. Explique-moi comment elle a pu me mentir durant toutes ces années. Dis-lui qu'on ne trompe pas un homme, un mari comme moi. Essaie de la convaincre de dire la vérité. Je n'en peux plus ! Ma tête va éclater !
ARDÈLE
On ne trompe pas un mari comme lui ! N'importe quoi ! Il veut la vérité, alors dis-lui ce que tu m'as encore confié dernièrement. Que c'est un minable, qu'il ne me mérite pas. Que jamais je n'aurais dû l'épouser. Qu'il est incapable de me rendre heureuse et qu'à ma place, il y a belle lurette que tu aurais pris un amant…
LA SŒUR (rouge, ne sachant quelle attitude prendre)
Moi, je t'ai dit tout ça… Quand ? Je ne veux pas être impliquée dans vos histoires de couple.
ARDÈLE (furieuse contre sa sœur)
On peut dire que tu as l'esprit de famille. J'attendais au moins un peu de soutien de ta part, contre cet énergumène qui croit que je le trompe, qui n'attend qu'un aveu de ma part pour me tromper à son tour. D'ailleurs, je me demande si vous n'êtes pas de connivence tous les deux au sujet de cette fichue lettre. Ma propre sœur me trahit ! Tu as écrit cette lettre pour qu'il puisse m'accuser d'avoir un amant. C'est même lui qui te l'a dictée. Mon Dieu ! je viens de comprendre : vous n'êtes pas seulement complices, vous êtes amants ! Et toi, le mari modèle, tu es un monstre ! Me tromper avec ma propre sœur… Vous ne respectez rien ni personne… C'est horrible d'être trahie par ceux que l'on aime et en qui on avait une totale confiance. Cette fois-ci, ma décision est prise, je pars, je ne resterai pas une minute de plus dans cette maison. Je te quitte. Et puisque ma mère est morte, comme tu as si bien su me le rappeler, je trouverai sûrement un véritable ami pour recueillir une épouse bafouée et une sœur indignement trahie. (Elle sort sous les yeux éberlués de la sœur et de l'Auteur.)
L'AUTEUR (sortant de son ébahissement)
Mais, mon amour, attend, ne pars pas… je t'aime. Je m'excuse. Tout ça, c'est de la faute de ta sœur… Reviens !

Sujet de réflexion
Autrefois, les gens se mariaient pour passer leur vie ensemble, les divorces demeuraient assez rares. Aujourd'hui, différentes enquêtes ont été récemment réalisées et montrent que le nombre des mariages diminue ; il est vrai qu'il existe désormais le PACS (pacte civil de solidarité), qui se développe considérablement, ceci sans compter la vie maritale, appelée aussi union libre ou concubinage.
Il semblerait donc que la vie conjugale dure moins longtemps, les couples se défont parfois après quelques années voire quelques mois. Nous sommes bien loin des noces d'or qui célèbrent cinquante années de mariage ! Est-ce à dire que les hommes et les femmes de notre époque ne conçoivent plus de vivre toute une vie avec le même partenaire ? Ont-ils peur de l'uniformité, de l'ennui que feraient naître le quotidien, la vie commune dans le monde moderne ? Rêvent-ils de changement, de nouveauté ?
Pensent-ils que la vitesse, l'instabilité, le changement, qui caractérisent notre société, le monde du travail de l'économie, touchent aussi le mariage et l'amour ? Amour ne rimerait donc plus avec toujours. Comme on est amené de plus en plus à changer de travail dans l'espace d'une vie professionnelle, on serait amené à changer d'époux ou d'épouse, l'amour ne résisterait plus à l'usure du temps. On peut également considérer que les générations « zapping » sont touchées par cet impérieux besoin de changer, de passer à autre chose, à un rythme plus ou moins rapide, comme on « zappe » devant son téléviseur ; la concentration, l'immobilité de la durée deviendraient des valeurs que l'on refuserait absolument. Certains considèrent également que c'est le sens des responsabilités qui fait défaut aujourd'hui : on aurait peur de s'engager officiellement parce que le mariage, véritable institution sociale et morale, ou toute autre forme de contrat écrit, constituerait une entrave à sa liberté, on refuserait alors de se laisser enchaîner, de se sentir lié par ces fameux liens conjugaux. En fait, ils voudraient vivre à deux mais en préservant leur totale indépendance. Or le mariage implique des droits et des devoirs.
Par ailleurs, aujourd'hui les médias et surtout les réseaux sociaux se sont considérablement développés grâce aux ordinateurs, aux smartphones ou aux tablettes. Chaque jour, chaque seconde, partout, nous sommes connectés au reste du monde grâce à Facebook, aux nombreux sites de rencontres, aux blogs, aux forums de discussion… Et puis les internautes n'hésitent plus, en créant leur profil sur ces sites, en discutant, à confier des choses tout à fait intimes, confidences qu'ils ne feraient jamais en face en face ! En conséquence, les sollicitations sont beaucoup plus nombreuses, il n'est plus nécessaire de sortir pour faire des rencontres : c'est le règne de la disponibilité totale, de « l'affichage ». De ce fait, on peut avoir l'impression d'avoir trouvé l'âme sœur, son « double », sa « moitié », l'être qui nous correspond le mieux, qui répond à toutes nos attentes, à nos aspirations, à notre idéal, beaucoup mieux en tout cas que celui ou celle qui partage notre vie.
En conclusion, la vie moderne, avec son rythme effréné, avec des médias omniprésents et tout-puissants, avec la libération des mœurs, a bouleversé l'idée que l'on se faisait du bonheur, du bonheur conjugal en l'occurrence. Cependant l'essentiel n'est pas dans le mariage mais dans l'amour ; en effet, des couples non mariés vivent parfaitement une union durable dans la mesure où leur amour est plus fort que tout. C'est donc peut-être moins le mariage qui est fragilisé par la vie moderne que l'amour lui-même.