La France et la construction de nouveaux États par la guerre et la diplomatie


Fiche

Pendant le règne de Napoléon III, l'unité allemande et l'unité italienne connaissent des progrès importants. L'empereur s'engage en faveur du principe des nationalités et soutient la cause de ces mouvements nationaux. Il agit par conviction, s'étant lui-même engagé lors de l'insurrection italienne de 1830, mais aussi afin de donner à la France une influence diplomatique majeure en Europe. Pourtant, le soutien à l'unité italienne et à l'unité allemande cause également des difficultés majeures. Le soutien accordé par l'empereur pour le maintien des États du pape conduit à un soutien incomplet à l'Italie et l'unité allemande se fait contre la France, lors de la guerre franco-prussienne de 1870-1871, qui conduit à la chute du régime et à la perte de l'Alsace et de la Lorraine germanophone.
I. Le second Empire et la cause de l'unité italienne
1. L'Italie en marche vers l'unité
• Depuis le début du xixe siècle, l'Italie connaît un mouvement national très actif. Le Piémont, dont le souverain, issu de la dynastie des ducs de Savoie, est également roi de Sardaigne, incarne désormais le mouvement national. Dans le reste de la péninsule, des États dynastiques sont protégés par l'Autriche, qui possède également le royaume lombardo-vénitien. En Italie centrale, on trouve les États de l'Église dirigés par le pape et, dans le Sud, le royaume de Naples, qui possède également la Sicile.
• À la suite de la défaite face à l'Autriche en 1849, le roi Charles-Albert a abdiqué en faveur de son fils Victor-Emmanuel II. Ce dernier commence une entreprise de modernisation de ses États, afin de leur donner un potentiel suffisant pour unifier autour de lui toute l'Italie. Il peut ainsi fédérer tous les Italiens souhaitant un pays unifié, mais aussi tous les libéraux, car le royaume de Piémont est une monarchie constitutionnelle. De grands ministres, comme Massimo d'Azeglio ou encore Camillo Benso, comte de Cavour, Premier ministre en 1852, entreprennent des réformes importantes et encadrent le décollage économique de l'État. Les mouvements issus du carbonarisme et les combattants des insurrections de 1848, comme Garibaldi, placent leurs espoirs dans la monarchie piémontaise. Toutefois, le Piémont a besoin de soutiens diplomatiques pour réaliser l'unité du pays et briser l'hégémonie autrichienne.
2. L'engagement français
• L'engagement français en faveur de l'unité italienne n'est pas immédiat. Soucieux de maintenir un équilibre avec l'Autriche, Napoléon III est d'abord attentiste. Il accepte la participation du Piémont dans la guerre de Crimée (1853-1866) aux côtés de la France, mais cela n'aboutit à aucune concession en Italie.
• Napoléon III a toutefois protégé en France certains patriotes italiens en exil à cause de leur engagement national. L'un d'entre eux, Felice Orsini, mécontent du fait que l'empereur ne soutienne pas explicitement l'unité, tente un attentat contre lui le 14 janvier 1858. Il y a douze morts, mais Napoléon III est indemne. Sensible à la lettre écrite par Orsini depuis sa prison et constatant le risque politique à ne plus intervenir, Napoléon III décide de rencontrer Cavour et d'établir une stratégie pour parvenir à unifier la péninsule.
• Lors de l'entrevue de Plombières, le 21 juillet 1858, Napoléon III et Cavour établissent une stratégie. L'année suivante, les troupes françaises soutiennent celles du Piémont contre l'Autriche, notamment lors des victoires de Magenta et de Solferino. La Lombardie est annexée par le Piémont. Cela donne le signal d'insurrections dans les autres États de la péninsule. En 1860, des plébiscites sont organisés dans les États d'Italie centrale, qui aboutissent au rattachement au Piémont. Dans le royaume de Naples, l'unité est accomplie grâce à l'action militaire de Garibaldi, lors de l'« expédition des Mille », corps de volontaires appelés « chemises rouges ». En 1861, le roi de Naples abdique. La même année, Victor-Emmanuel II se proclame roi d'Italie.
• La cause italienne a ainsi apporté du prestige à Napoléon III. En échange de son soutien, l'empereur a également négocié l'organisation de plébiscites dans deux régions francophones appartenant au Piémont : Nice et la Savoie. En 1860, ils sont rattachés à la France, dont ils forment trois départements.
3. Une unité inachevée
• Toutefois, les acquis de Napoléon III restent limités. En effet, le soutien à l'unité italienne place l'empereur devant ses contradictions. En 1869, pour ménager l'Autriche, il lui laisse la Vénétie, ce que le Piémont considère comme une trahison. En 1866, c'est une alliance avec la Prusse contre l'Autriche qui permet, à la suite d'une guerre, d'annexer la Vénétie à l'Italie.
• Craignant de perdre le soutien des catholiques français, il empêche l'annexion des États de l'Église à l'Italie, même s'ils sont désormais réduits à Rome et au Latium. Les patriotes italiens parlent ainsi de trahison française. En 1867, lors de la tentative de prise de Rome par Garibaldi, ce sont des troupes françaises qui, lors de la bataille de Mentana, repoussent les chemises rouges. On dit alors en Italie que « Mentana a tué Magenta ».
• Ainsi, c'est la Prusse et non plus la France, qui semble un allié crédible pour la cause italienne. L'Italie n'aida pas la France lors de la guerre franco-prussienne de 1870-1871. C'est même suite à l'effondrement français de 1871 que les troupes italiennes prirent Rome, qui devint la capitale du royaume d'Italie.
Exercice n°1Exercice n°2
II. L'unité allemande : la Prusse contre la France
Tout comme l'unité italienne, l'unité allemande s'accomplit autour d'un État qui incarne la cause nationale et organise autour de lui la nouvelle nation. Il s'agit là de la Prusse. Dans ce cas, Napoléon III, après avoir soutenu la cause de l'unité nationale allemande, va voir cette émergence s'opérer contre la France.
1. L'unité allemande ou la Prusse contre l'Autriche
Otto von Bismarck en 1860
La France et la construction de nouveaux États par la guerre et la diplomatie - illustration 1
• L'unité allemande avait échoué en 1848. L'Autriche, qui assure la présidence de la Confédération germanique, a retrouvé son autorité après l'épisode du parlement de Francfort et le refus du roi de Prusse de disposer d'une couronne issue d'une révolution. Ainsi, l'Allemagne demeure divisée en de nombreux États. Le royaume de Prusse va alors tenter d'accomplir autour de lui l'unité allemande par étapes, en évinçant l'Autriche.
• À partir de 1862, le nouveau chancelier prussien, Otto von Bismarck, réorganise l'armée et gouverne de façon autoritaire. Il mène une « realpolitik » tirant profit des circonstances pour faire de la Prusse la championne de la cause allemande. En 1864, il pousse la Confédération germanique à entrer en guerre contre le Danemark pour protester contre l'annexion par celui-ci de deux duchés germanophones : le Schleswig et le Holstein. À la suite du désaccord avec l'Autriche sur la gestion de ces deux duchés, il fait sortir la Prusse de la Confédération germanique et entre en guerre contre l'Autriche en 1866, qui est vaincue. La Prusse obtient la dissolution de la Confédération germanique et l'annexion de la plupart des États d'Allemagne du Nord. Napoléon III décide alors de monnayer sa neutralité en échange de « pourboires » pour la France, comme la possibilité d'annexer le Luxembourg ou la Belgique dans le cas d'un conflit. Il commet ainsi une importante maladresse diplomatique. Bismarck informe les États d'Allemagne du Sud de cette demande française. Ces derniers, prenant peur face à ces revendications, se placent sous la protection de la Prusse, alors que l'Angleterre garantit la neutralité de la Belgique et du Luxembourg. En 1867, la Prusse a par ailleurs constitué une Confédération d'Allemagne du Nord sous la présidence prussienne.
2. La guerre contre la France, ciment de l'unité allemande
• Bismarck souhaite unifier l'Allemagne dans le cadre d'une guerre victorieuse. Les maladresses diplomatiques de Napoléon III lui en donnent l'occasion. En 1870, Bismarck publie une version abrégée de façon à être insultante d'une dépêche diplomatique française dans laquelle Napoléon III demande que la famille royale prussienne, les Honhenzollern, renonce à leurs prétentions sur le trône d'Espagne. Cette « dépêche d'Ems » provoque une vague de protestations contre la France. L'opinion française s'échauffe et plusieurs voix s'élèvent pour demander une entrée en guerre. Pensant que cela pourrait consolider son régime, Napoléon III déclare la guerre à la Prusse le 19 juillet 1870.
La France se trouve isolée diplomatiquement. Les États d'Allemagne du Sud se rangent du côté de la Prusse, les Anglais n'interviennent pas, après que Bismarck les a informés de la politique française des « pourboires », et l'Italie reste neutre, car la France, soutenant le pape, empêche l'achèvement de l'unité.
• La guerre est un désastre pour la France. Le 1er septembre 1870, Napoléon III est fait prisonnier. Le 4 septembre, le régime tombe et la République est proclamée.
3. La naissance du IIe Reich
• Les républicains au pouvoir, comme Léon Gambetta, décident de poursuivre le combat. Après le siège de Paris, le gouvernement doit pourtant signer l'armistice en janvier 1871. Le 18 janvier 1871, dans la galerie des Glaces du château de Versailles, dont les peintures illustrent les triomphes de Louis XIV, Guillaume Ier, roi de Prusse, proclame l'Empire allemand, et prend le titre de Kaiser. Les clauses du traité de Francfort, le 10 mai 1871, sont très lourdes. La France perd l'Alsace et la partie germanophone de la Lorraine, le critère linguistique ayant été retenu par les Prussiens. Un nombre important de départements français subit une occupation allemande. L'unité allemande s'est opérée contre la France et permet la naissance d'un État puissant, porteur d'une idéologie pangermaniste, c'est-à-dire visant l'unité de tous les germanophones d'Europe, et capable de rivaliser économiquement avec la Grande-Bretagne.
Exercice n°3Exercice n°4Exercice n°5
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