La Révolution française et l'Empire : une nouvelle conception de la nation


Fiche

La Révolution française est un événement majeur de la fin du xviiie siècle. Née des difficultés de la monarchie et des contestations de l'absolutisme, elle marque une rupture totale avec l'Ancien Régime (la période précédente) dans le domaine politique, mais aussi dans les domaines économique, social et culturel.
La France se modernise et change de visage. Un nouvel univers politique et social émerge : les Français n'étaient que des sujets, ils deviennent des citoyens impliqués dans la vie politique d'une nation souveraine unifiée.
Mais la Révolution crée aussi des divisions durables dans la société française, entre les plus progressistes et les plus conservateurs. Elle s'achève par la prise du pouvoir de Bonaparte et la proclamation de l'Empire en 1804. Ce régime associe pouvoir monarchique et personnel et héritages de la Révolution avant sa chute définitive en 1815.
I. 1789 : pourquoi une Révolution ?
1. Un contexte entre tensions et espoirs
• En 1788, le budget de l'État est en énorme déficit. L'argent sert à payer les intérêts de la dette, les impôts rentrent mal : il faut réformer le système fiscal. La guerre d'indépendance américaine a coûté très cher au royaume.
• Le roi Louis XVI tente des réformes, mais il est trop faible pour les imposer. Elles échouent et la France est partagée entre les revendications incompatibles des différentes catégories sociales :
  • les nobles conservateurs sont contre les réformes et veulent retrouver leurs pouvoirs ;
  • la bourgeoisie progressiste veut une modernisation de la société et du système politique ;
  • le reste du tiers état veut une amélioration de ses conditions de vie ;
  • le haut clergé partage les revendications de la noblesse, le bas clergé partage celles du tiers état.
2. La fin de l'Ancien Régime et la naissance du citoyen français
Prise de la Bastille
La Révolution française et l'Empire : une nouvelle conception de la nation - illustration 1
• Le roi demande la réunion des états généraux le 5 mai 1789 pour résoudre le problème des finances du royaume. Des cahiers de doléances sont rédigés dans le royaume : pour la première fois, les citoyens français peuvent exposer leurs idées. Cette réunion soulève beaucoup d'espoirs, mais chaque ordre reste sur ses revendications, et tous sont déçus de voir le roi se concentrer sur la question des finances.
• Les députés du tiers état (et quelques jeunes nobles progressistes) se révoltent et se déclarent Assemblée nationale le 17 juin 1789. Le roi ayant fait fermer leur salle, ils se réunissent dans celle du Jeu de paume le 20 juin et prêtent serment de donner à la France une Constitution.
• Les gardes du roi cernent la salle. Le 23 juin, les Parisiens se soulèvent pour protéger leurs députés : ils créent une municipalité, une garde nationale et cherchent des armes.
• Le 27 juin, le roi cède. Le 9 juillet, les trois ordres réunis se proclament « Assemblée nationale constituante » : c'est la fin de la monarchie absolue. La souveraineté n'appartient plus au roi mais à la nation.
• Le 14 juillet 1789, les insurgés parisiens prennent la Bastille, le symbole du pouvoir royal.
• La Révolution gagne le reste du royaume : les grandes villes françaises suivent l'exemple de Paris, puis la « grande peur » gagne les campagnes.
• Les députés du tiers état sont des bourgeois : ils se méfient de ces soulèvements populaires incontrôlables. Avec les députés de la noblesse et du clergé, ils votent l'abolition des privilèges dans la nuit du 4 août 1789 : c'est la fin de la société d'ordres.
3. De nouvelles valeurs
• Le 26 août 1789, ils proclament la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.
• La société de l'Ancien Régime n'existe plus. Les Français ne sont plus des sujets mais des citoyens, les valeurs libérales triomphent : souveraineté de la nation, libertés individuelles, égalité des citoyens, protection de la propriété privée.
• Le 5 octobre 1789, une délégation de Parisiens arrive à Versailles et conduit le roi, sa famille et l'Assemblée, à Paris.
Exercice n°1Exercice n°2
II. La Révolution, entre idéalisme et jeu politique (1790-1799)
1. L'échec de la monarchie constitutionnelle (1790-1792)
• L'Assemblée nationale va entreprendre de nombreuses réformes pour moderniser la France. En 1790, elle crée les départements ; la justice, la fiscalité sont décentralisées et des fonctionnaires locaux sont élus.
• La Constitution de 1791 est basée sur la séparation des pouvoirs entre le roi et l'Assemblée, élue au suffrage censitaire indirect. Le roi garde le pouvoir exécutif et un droit de veto suspensif (il peut suspendre une loi pendant 4 ans).
• L'Assemblée favorise la liberté économique et, pour rembourser les dettes de l'État, elle confisque les biens du clergé. En échange, la Constitution civile du clergé accorde une rémunération des clercs par l'État contre un serment de fidélité à la Constitution. Certains acceptent, ceux qu'on appelle les prêtres assermentés ou jureurs. Les réfractaires refusent, après que le pape a condamné la Constitution civile du clergé.
• La vie politique est intense dans les villes : des clubs politiques sont créés sur le modèle des clubs parisiens (le club des Jacobins, le club des Cordeliers…). Les journaux se multiplient et les citoyens français se passionnent pour la politique. À Paris, les sans-culottes (artisans, petits commerçants) sont les plus révolutionnaires.
• L'affaiblissement des pouvoirs du roi et le contrôle du clergé divisent les Français :
  • les monarchistes pensent que la Révolution va trop loin, que le roi doit garder plus de pouvoirs ;
  • les Feuillants sont modérés ;
  • les Jacobins pensent qu'il faut aller plus loin. Certains, minoritaires, veulent même une république.
• L'Assemblée est divisée entre les conservateurs (à droite) et les progressistes (à gauche).
• En tentant de fuir le royaume en juin 1791, Louis XVI perd la confiance du peuple parisien, tout comme l'Assemblée lorsqu'elle tente de protéger le roi.
• La France est menacée par la Prusse et plusieurs monarchies européennes qui craignent la contagion des idées françaises au reste de l'Europe. La France leur déclare la guerre.
• Le 10 août 1792, la foule s'empare du château des Tuileries. Le roi est emprisonné.
2. Les débuts de la République marqués par la violence de la Terreur (1792-1794)
• La monarchie est abolie, ce qui proclame de fait la République le 21 septembre 1792 après la victoire française de Valmy. L'armée de soldats citoyens remporte ainsi la victoire face aux armées restées sur le modèle d'un commandement aristocratique.
• La nouvelle assemblée, la Convention, est composée de bourgeois républicains. Les Girondins sont les plus modérés, ils se méfient des sans-culottes. Les Montagnards sont les plus révolutionnaires.
• Le 21 janvier 1793, le roi Louis XVI est guillotiné après un procès mené par l'Assemblée, désormais appelée « Convention », chaque député ayant eu à se prononcer sur la culpabilité du roi et sur la peine à appliquer.
• La France est menacée par les royaumes voisins et par la guerre civile qui éclate dans l'Ouest en mars 1793. Les mouvements contre-révolutionnaires se développent. Des difficultés économiques aggravent la situation.
• La République est « en péril ». Les Montagnards et Robespierre prennent le pouvoir en juin 1793. La Convention met en avant les idées de liberté, d'égalité, de fraternité, de laïcité et le suffrage universel masculin.
• Mais, pour sauver la Révolution, la Terreur est instaurée à partir du 5 septembre 1793 : les libertés fondamentales et la Constitution sont suspendues et tous ceux qui contestent la Révolution ou les décisions de l'Assemblée sont jugés par le Comité de salut public et exécutés. Des milliers de personnes (royalistes, prêtres réfractaires ou révolutionnaires) sont guillotinées. Parmi elles, on trouve les députés qualifiés de « Girondins », qui souhaitaient un équilibre entre Paris et la Province et étaient hostiles à la Terreur. Plusieurs femmes qui s'impliquèrent dans le débat politique, bien que privées du droit de vote, furent elles aussi victimes de la Terreur, telle madame Roland, proche des Girondins, guillotinée en 1793. Le pays est déchristianisé et une religion civique est créée : le « culte de l'Être suprême ».
• La Terreur ne se justifie plus après la victoire française de juin 1794. Robespierre est exécuté à son tour et des bourgeois plus modérés prennent le pouvoir : le Directoire remplace la Convention.
3. La réaction conservatrice et la fin de la Révolution (1794-1799)
• Les Thermidoriens sont des bourgeois républicains attachés aux valeurs individualistes, ils reviennent au suffrage censitaire et à la défense de la propriété privée.
• Pour éviter les dérives de la Terreur et rassurer les royalistes et les modérés, ils divisent les pouvoirs exécutif et législatif entre plusieurs « Directeurs » et deux assemblées. Mais ce système est compliqué et fragile.
• Ils mènent une politique très libérale, qui augmente les inégalités sociales : en 1795, ils écrasent le soulèvement des sans-culottes parisiens.
• Ils répriment aussi « la Terreur blanche », massacres menés par les royalistes contre les révolutionnaires.
• Les Thermidoriens sont donc obligés d'utiliser l'armée et de multiplier les coups d'État pour gouverner. La France a en effet remporté d'importantes victoires et contrôle désormais la Belgique actuelle, l'Italie et, en 1798, Bonaparte est envoyé en Égypte pour contrer les Anglais. Il acquiert auprès des Français un prestige qui manque aux députés et aux directeurs.
Exercice n°3Exercice n°4
III. Le pouvoir personnel de Napoléon Bonaparte entre France et Europe
1. La confiscation de la République par Bonaparte en 1799
• La période révolutionnaire a été marquée par une grande instabilité politique entre 1789 et 1799 mais aussi par des difficultés économiques et sociales qui favorisent les soulèvements populaires.
• De nombreuses personnes veulent donc un régime politique qui garantirait la stabilité politique, sociale et économique du pays tout en gardant l'héritage de 1789.
• Le général Bonaparte, qui s'est couvert de gloire à la tête des armées révolutionnaires, profite de la situation pour prendre le pouvoir lors du coup d'État des 18 et 19 brumaire (9 et 10 novembre 1799).
2. Le Consulat : un régime de plus en plus autoritaire
• Bonaparte mène une politique de réconciliation nationale pour rétablir la paix en France :
  • pour satisfaire les royalistes, il accepte, sous conditions, le retour des nobles émigrés pendant la Révolution et signe un concordat avec le pape en 1801 ;
  • pour les révolutionnaires, il rétablit le suffrage universel.
• Il prend surtout beaucoup de mesures en faveur des libéraux et s'appuie sur les notables : renforcement du droit de propriété, retour de la prospérité économique, contrôle des employés avec le livret ouvrier, promotion sociale des enfants de l'élite avec la création des lycées.
• Il réorganise l'État et l'administration : crée la Banque de France, les préfets ; réforme les impôts ; instaure le Code civil en 1804. Ce texte est d'essence plutôt conservatrice mais il intègre certains acquis de la Révolution, comme le divorce. Sa mise en place dans plusieurs pays d'Europe pendant l'Empire y laissa des traces durables. Mais son régime est de plus en plus autoritaire et centralisé : en tant que premier consul, il concentre les pouvoirs exécutifs et certains pouvoirs législatifs. Il a recours au plébiscite (vote de confiance des citoyens) pour gouverner. Finalement, il se fait nommer consul à vie en 1802.
3. L'Empire (1804-1814/1815)
• En 1804, Bonaparte se fait proclamer empereur des Français. Il renforce les acquis du Consulat et mène une politique autoritaire. Le ministre Fouché contrôle ainsi la presse. La politique extérieure menée par Napoléon consiste à donner à la France l'hégémonie en Europe. Le territoire national est porté en 1812 à 130 départements, de Rome à Hambourg. Pour cela, il utilise l'armée issue de la Révolution comme outil de sa gloire : les « grognards » formant la « Grande Armée » portent la légende napoléonienne jusqu'au xixe siècle. Malgré d'importantes victoires, comme celle d'Austerlitz en 1805 sur l'Autriche, il ne parvient pas à créer des alliances durables et les autres pays forment contre la France plusieurs coalitions. Contre l'Angleterre, la mise en place d'un blocus continental est un échec.
• Le modèle de la nation française avait fait naître des espoirs chez certains peuples. Des Allemands et des Italiens avaient vu arriver les armées françaises en libératrices contre les souverains. Mais la France soumet en réalité ces territoires. Napoléon les annexe ou y crée des royaumes attribués à des membres de sa famille. Ainsi, le sentiment antifrançais renforce le sentiment national. En 1812, l'Allemand Fichte proclame un Appel à la nation allemande contre la France.
• La campagne de Russie en 1812 se solde par un désastre. En 1814, les Prussiens, les Russes et les Autrichiens occupent la France. Louis XVIII, frère de Louis XVI, est placé sur le trône. Malgré les Cent-Jours où il parvient à rétablir son pouvoir de mars à juin 1815, Napoléon est exilé sur l'île de Sainte-Hélène, où il meurt en 1821.
Exercice n°5
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