Politique et société en France sous la IIe République et le Second Empire


Fiche

Entre 1848 et 1870, deux régimes politiques se succèdent en France : la IIe République de 1848 à 1851 et le Second Empire de 1851 à 1870. Cette période se caractérise par une évolution politique contrastée ainsi que d'importants bouleversements économiques et sociaux.
En quoi les bouleversements politiques et sociaux sont-ils liés dans la période 1848-1870 ?
La IIe République : de l'affirmation des grands principes démocratiques au retour des conservateurs
Une nouvelle République née d'une révolution
• En 1848, la France est une monarchie parlementaire : le pouvoir est partagé entre le Parlement et Louis-Philippe Ier, roi des Français. Les députés sont élus au suffrage censitaire : de ce fait, le corps électoral est très peu nombreux. Dans un contexte de crise politique et économique, les opposants à la monarchie de Juillet, qui réclament notamment l'adoption du suffrage universel, gagnent de plus en plus de partisans. Sous l'impulsion de ceux-ci, une partie du peuple parisien se soulève lors des journées révolutionnaires du 22 au 24 février 1848.
• Après l'abdication de Louis-Philippe, la République est proclamée le 24 février 1848 et un gouvernement provisoire, composé de républicains tels qu'Alphonse de Lamartine ou Louis Blanc, décide la future élection d'une Assemblée constituante.
Des idéaux démocratiques hérités de la Révolution française
• Les membres du gouvernement provisoire renouent avec des idéaux démocratiques hérités de la Révolution française : une démocratie est un régime politique dans lequel les citoyens, dont les libertés fondamentales sont garanties, exercent la souveraineté.
• De grandes mesures sont prises dans les premiers mois de la République, qui font progresser la démocratie. Ainsi, le suffrage universel masculin est rétabli : tous les citoyens majeurs de sexe masculin peuvent voter, sans condition de revenu. L'abolition de l'esclavage (avril 1848) dans les colonies françaises réaffirme les grands principes de liberté et d'égalité.
• Par ailleurs, des mesures sociales répondent aux exigences nouvelles qui émergent dans la société française : en effet, les classes populaires vivent difficilement et revendiquent une plus grande solidarité de la part de l'État. Ainsi, le 26 février 1848, les Ateliers nationaux sont créés pour employer les ouvriers au chômage, dessinant les contours d'un « droit au travail ».
Le recul des libertés à partir de juin 1848
• Cependant, le projet républicain est remis en cause par la victoire du parti de l'Ordre aux élections législatives d'avril 1848. Le parti de l'Ordre regroupe les monarchistes et les républicains hostiles à une démocratie sociale et à l'intervention de l'État dans l'économie, comme Adolphe Thiers par exemple. La fermeture des Ateliers nationaux provoque des émeutes à Paris, qui sont très durement réprimées lors des journées de juin (22-26 juin 1848). Cette répression sanglante creuse un fossé profond entre la République et les ouvriers.
• En novembre 1848, la nouvelle Constitution sépare les pouvoirs législatif et exécutif et instaure un régime présidentiel où le chef de l'État est élu au suffrage universel pour quatre ans. Aux élections présidentielles du 10 décembre 1848, Louis-Napoléon Bonaparte est élu président de la République avec 74 % des voix. Neveu de l'empereur Napoléon Ier, il bénéficie de la légende napoléonienne et de l'adhésion massive des paysans. Arrivé au pouvoir, il nomme des conservateurs dans son gouvernement, c'est-à-dire des partisans d'un retour à la monarchie. En 1850, une série de lois limitent la démocratie et marquent le recul des libertés : restriction de la liberté de la presse, limitation du suffrage (les hommes qui ne résident pas trois années de suite au même endroit en sont exclus), liberté de l'enseignement qui favorise l'influence du clergé (loi Falloux).
• Selon la Constitution, le président de la République ne peut être réélu que quatre ans après la fin de son mandat. Or, Louis-Napoléon Bonaparte adopte vite une attitude ambiguë : fort d'être héritier de l'Empire, il reprend l'apparat impérial et se fait appeler « Prince-Président ». Devant les refus de l'Assemblée nationale de réformer la Constitution pour permettre sa réélection, il organise un coup d'État le 2 décembre 1851, jour anniversaire du sacre de Napoléon Ier en 1804. Ce coup d'État met fin à la République et prépare le retour de l'Empire.
Exercice n°1Exercice n°2
Le Second Empire, un régime autoritaire
La mise en place d'un pouvoir personnel et autoritaire
• Dans les jours qui suivent le coup d'État, les manifestations sont très durement réprimées : il y a de nombreuses arrestations et des centaines de victimes à Paris et en province. Dans ce contexte de répression, Louis-Napoléon Bonaparte rétablit le suffrage universel masculin et organise un plébiscite, c'est-à-dire un vote direct des électeurs, qui répondent à une question par oui ou par non. Le Prince-Président demande le droit de rédiger une nouvelle Constitution : les résultats, qui lui sont largement favorables, légitiment son pouvoir.
• Les institutions du nouveau régime sont organisées par la Constitution du 14 janvier 1852 : le Prince-Président devient seul détenteur du pouvoir exécutif. Le 2 décembre 1852, un an après son coup d'État, il est proclamé empereur sous le nom de Napoléon III.
• Le Second Empire est un régime autoritaire : les forces de police sont triplées et les opposants au régime sont proscrits, c'est-à-dire condamnés à l'exil. C'est le cas du député Victor Hugo. Après l'attentat de 1858 contre l'empereur, la loi de sûreté générale du 27 février 1858 punit de prison toute tentative d'opposition. La censure est renforcée et la presse contrôlée. Si les députés sont élus au suffrage universel, c'est Napoléon III qui désigne les candidats jusqu'en 1870, et ces derniers doivent prêter serment à l'empereur. Les ministres qui forment le gouvernement ne peuvent s'opposer aux projets du chef de l'État et sont révocables à tout moment.
La conservation de certaines pratiques démocratiques
• Cependant Napoléon III fonde la légitimité du pouvoir sur le soutien du peuple. C'est toute l'originalité du bonapartisme : l'alliance d'un pouvoir politique fort et de la souveraineté populaire est commune aux deux empereurs Napoléon Ier et Napoléon III. C'est la raison pour laquelle le suffrage universel masculin est maintenu et les plébiscites se multiplient durant le règne de l'empereur.
• En outre, comme son oncle avant lui, Napoléon III adhère aux principes juridiques et sociaux de 1789 : l'empereur veut améliorer les conditions de vie du peuple et, face aux critiques qui s'élèvent contre sa politique de répression, va se montrer favorable à une libéralisation du régime à partir des années 1860.
L'Empire libéral (années 1860-1870)
• En 1860, le régime autorise le débat au sein de Corps législatif. Les libéraux, inquiets du recul des libertés, s'imposent peu à peu dans les débats. Ainsi, le député Adolphe Thiers défend en 1864 le respect des libertés fondamentales et réclame le rétablissement d'un véritable régime parlementaire. Dans les années 1860, le Corps législatif retrouve peu à peu le droit de discuter puis de proposer les lois, tandis que la loi sur la presse est assouplie. Le droit de grève est reconnu en 1864. Ces lois d'inspiration libérale permettent à l'opposition républicaine de s'affirmer, dans un contexte de croissance économique et de stabilité politique. Il y a donc une démocratisation progressive du régime.
• Cela dit, l'adhésion populaire à l'Empire reste forte, d'autant plus qu'elle est entretenue par une propagande active fondée sur le glorieux souvenir de Napoléon Ier. Pour s'inscrire dans l'héritage de son oncle, Napoléon III met sans cesse en avant la dimension militaire du régime. Fort de son succès lors du plébiscite de 1870 sur la Constitution libérale de l'Empire, il déclare la guerre à la Prusse le 19 juillet 1870. Lors de la bataille de Sedan, Napoléon III capitule et se rend aux Prussiens. La défaite française aboutit à l'unité allemande et à l'annexion de l'Alsace-Moselle par l'Allemagne. Deux jours après, le 4 septembre 1870, la IIIe République est proclamée.
Exercice n°3Exercice n°4
Des transformations économiques et sociales majeures
Un idéal modernisateur sous le Second Empire
• Louis-Napoléon Bonaparte, avant d'être élu président de la IIe République, a été exilé en Angleterre, pays moteur de la « révolution industrielle ». À son arrivée au pouvoir, il souhaite donc s'inspirer du modèle anglais pour encourager l'innovation. Sous l'Empire, les réussites industrielles sont mises en scène par les Expositions universelles de 1855, 1857 et 1867.
• Ainsi, la machine à vapeur, inventée au xviiie siècle, se diffuse dans l'industrie textile ou la métallurgie du fer. L'industrialisation de la France s'accélère sous le Second Empire : l'industrie devient progressivement la principale activité économique et le moteur de la croissance.
• Pour financer cette modernisation, le système bancaire se développe de manière spectaculaire. Ainsi, en 1852, les frères Pereire fondent le Crédit mobilier, une société par actions destinée à aider les commerçants et les industriels dans leurs investissements.
• Le libéralisme économique mis en place sous le Second Empire encourage la compétition entre entrepreneurs et l'innovation : dans le domaine économique, cela se traduit par l'affirmation de la propriété privée, du principe de concurrence et de la limitation des règles imposées aux entrepreneurs. Par exemple, en 1860, un traité de libre-échange est signé entre la France et la Grande-Bretagne.
La révolution des transports
• L'industrialisation s'accompagne d'une révolution des transports. L'État soutient le développement des moyens de transport, et notamment du réseau ferré : grâce à l'invention de la machine à vapeur, les lignes de chemins de fer se multiplient. La ligne Paris-Lyon-Méditerranée (« ligne PLM ») est inaugurée en 1857. Le développement du chemin de fer décloisonne les campagnes et favorise la circulation rapide des hommes et des marchandises.
• En outre, les bateaux à vapeur remplacent progressivement la navigation à voile. Certains ports comme celui du Havre et de Marseille sont agrandis et de grandes compagnies maritimes sont créées. Cela permet de créer des liaisons avec le reste du monde : ainsi, en 1864, la Compagnie générale transatlantique ouvre une ligne reliant Le Havre à New York.
Les conséquences de l'industrialisation
• La mécanisation des travaux agricoles permet de fortement augmenter la productivité, mais elle diminue également les besoins en main-d'œuvre dans les campagnes. En outre, l'ouverture de nombreuses industries dans les villes ou à proximité de celles-ci crée de l'emploi et favorise l'exode rural. Les ouvriers deviennent de plus en plus nombreux ; installés dans les quartiers insalubres des villes, ils ont des salaires faibles et des conditions de vie difficiles.
• Ainsi, entre 1848 et 1870, la part de la population urbaine en France passe de 24 % à 35 %. C'est ce qu'on appelle l'urbanisation : un processus de croissance de la population urbaine et d'extension des villes. Le moteur principal de la croissance urbaine en France est la croissance de Paris. Cela dit, dans les régions industrielles ou minières, la croissance de la population est également très forte : par exemple dans les villes textiles de Roubaix et Tourcoing ou dans des villes métallurgiques comme Le Creusot.
• La ville, en devenant le lieu de la modernité par excellence, concentre des enjeux d'hygiène, de salubrité, de prestige, de contrôle social et de fluidification du trafic. C'est pourquoi l'État commande des travaux d'urbanisme de grande envergure, comme à Paris sous l'impulsion de Napoléon III. Entre 1853 et 1870, l'empereur confie au baron Haussmann, alors préfet de la Seine, la transformation du paysage parisien. Ce dernier élabore de grandes avenues en ligne droite, qui débouchent sur de grands monuments comme le palais Garnier, symbole du rayonnement culturel de l'Empire, ou la gare de Lyon et la gare du Nord.
Exercice n°5
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