Les espaces ruraux dans le monde

Dans un contexte de mondialisation, les espaces ruraux connaissent de profondes transformations. Ces territoires sont de plus en plus liés à l'espace urbain. Si la place de l'agriculture y reste importante à l'échelle mondiale, les espaces ruraux ont des fonctions de plus en plus diversifiées.
Quelles dynamiques économiques et socio-spatiales contribuent à la transformation des espaces ruraux ?
L'espace rural dans la mondialisation
Définir l'espace rural
• L'espace rural est souvent défini par défaut comme ce qui ne relève pas de la ville. Les paysages marqués par la présence importante de formations végétales, la faible densité des personnes, des infrastructures et de l'emploi et la relative importance des activités agricoles sont caractéristiques des espaces ruraux.
• Aujourd'hui, l'espace rural est le lieu de vie de 45 % de la population mondiale. À plus grande échelle, les situations sont contrastées. Les populations rurales asiatiques et africaines représentent la majorité de la population rurale mondiale. Ainsi par exemple, alors que 70 % de la population indienne est rurale, c'est le cas de seulement 25 % de la population française.
Un espace rural globalement en recul
• À l'échelle mondiale, on observe cependant un processus d'urbanisation généralisé qui s'accompagne d'un recul progressif de l'espace rural. L'exode rural amorcé dès le xviiie siècle en Europe se poursuit aujourd'hui dans les pays en développement : l'espace urbain est attractif car il donne l'espoir d'une vie meilleure (meilleur accès à l'emploi et aux services).
• Ainsi, certains espaces ruraux se caractérisent par leur enclavement et leur isolement, en situation périphérique par rapport aux villes. C'est également le cas dans les pays développés. Par exemple, en France, certains espaces du « rural isolé » ou « hyper-rural » continuent de perdre de la population, tandis que les services publics de proximité ferment (poste, écoles, lignes ferroviaires secondaires).
• Cependant, il existe de nombreux types d'espaces ruraux aux fonctions diversifiées : certains d'entre eux sont pleinement intégrés à la mondialisation, tandis que d'autres parviennent à redynamiser l'économie locale grâce au développement de nouvelles fonctions.
Exercice n°1
Une multifonctionnalité de plus en plus forte
Une activité agricole encore très importante
• Même si elle a tendance à reculer, la fonction agricole reste très importante dans les espaces ruraux. Ainsi, environ une personne sur trois travaille dans l'agriculture dans le monde, principalement dans les pays en développement.
• La mondialisation met en concurrence les territoires, y compris les espaces agricoles. Ainsi, les dynamiques induites par la mondialisation contribuent à une spécialisation accrue des espaces agricoles. Les pays développés et certains pays émergents comme le Brésil ont mis en œuvre une agriculture productiviste et mécanisée : les importants rendements produits par cette agriculture sont destinés à l'exportation.
• Certains pays du Sud, pour rester compétitifs, modernisent leur système agricole : il y a de nombreux fronts pionniers à vocation agricole en Amérique latine, en Asie du Sud-Est et dans certains pays africains. D'autres mettent en place une « révolution verte » en appliquant des techniques d'intensification agricole.
• Cela dit, dans beaucoup de pays en développement, particulièrement en Afrique subsaharienne, l'agriculture est majoritairement vivrière et non mécanisée : les rendements sont faibles et souvent aléatoires, à destination de la famille ou du marché local.
• La mise en concurrence des territoires induit donc une forte inégalité dans le domaine agricole : alors que dans les pays développés, le nombre d'agriculteurs diminue grâce à une agriculture intensive (rendements maximisés sur une surface donnée, grâce à la mécanisation et à l'usage d'intrants chimiques), le nombre d'agriculteurs reste très élevé dans les pays en développement du fait d'une agriculture extensive (rendements faibles sur de vastes étendues qui nécessitent un grand nombre d'emplois).
Une diversification des fonctions
• L'activité agricole n'est pas la seule fonction des espaces ruraux. L'activité industrielle y est présente depuis longtemps : elle y bénéficie de terrains disponibles à moindre coût et d'un bassin d'emploi. Par exemple, en France, plus des deux tiers des emplois industriels sont localisés dans les espaces périurbains et ruraux.
• En outre, depuis les années 1950, le tourisme est devenu un moteur de développement économique pour les espaces ruraux. Développé initialement dans les pays du Sud, l'écotourisme repose sur les paysages, la nature et la pratique de loisirs en plein air, dans le respect de l'environnement et des populations locales. Dans les pays du Nord, les chambres d'hôtes, gîtes et campings permettent aux populations locales d'avoir un complément de revenu et de valoriser leur territoire de vie aux yeux des populations urbaines. L'activité économique peut se trouver revivifiée par le « tourisme vert », même si ce dernier est souvent saisonnier.
• Enfin, la fonction résidentielle des espaces ruraux est en plein essor, notamment dans les pays développés : l'arrivée de néoruraux, c'est-à-dire de citadins venant habiter à la campagne, conduit à une recomposition sociale des espaces ruraux proches des villes. Curieux d'expérimenter un nouveau mode d'habiter, ces nouveaux arrivants amènent avec eux des pratiques urbaines et des habitudes de consommation qui contribuent à la transformation de ces espaces.
• Il y a donc une multifonctionnalité des espaces ruraux, dans un contexte où la pression foncière devient de plus en plus forte et où les acteurs aux intérêts divergents se multiplient.
Des défis majeurs de gestion
• La multiplication des acteurs des espaces ruraux (agriculteurs, chasseurs, néoruraux, randonneurs…) peut en effet entraîner des conflits d'usage.
• En outre, l'agriculture intensive pose des problèmes environnementaux et sanitaires, du fait de l'utilisation des intrants chimiques (engrais, pesticides) ou encore des fronts pionniers qui entraînent la disparition de millions d'hectares de forêts et sa biodiversité.
• L'espace rural peut ainsi devenir le symbole d'une identité à défendre : les zones à défendre (ZAD) se multiplient dans des pays comme la France. Il s'agit d'une occupation à but politique d'un territoire dans le but de s'opposer à un projet d'aménagement. Par exemple, la ZAD de Notre-Dame-des-Landes, à proximité de Nantes, est montée en 2014 par des opposants au projet de construction d'un aéroport international sur ces terrains. Le projet est finalement abandonné en 2018.
• Face à ces grands défis de gestion, l'État est un acteur majeur de la protection des espaces ruraux : ainsi, partout dans le monde sont créés des parcs nationaux, qui entraînent à la fois la patrimonialisation du paysage et la création d'un espace de loisirs pour les citadins.
Exercice n°2Exercice n°3
Des espaces ruraux grignotés par les villes
Des liens de plus en plus étroits
• Aujourd'hui, 54 % de la population mondiale vit en ville, contre 2 % au début du xixe siècle. Ainsi, à l'échelle mondiale, la population urbaine dépasse la population rurale : c'est ce qu'on appelle la transition urbaine. Si l'urbanisation est ancienne dans les pays développés, aujourd'hui la croissance urbaine la plus importante a lieu dans les pays du Sud.
• Cette urbanisation, qui s'est accélérée depuis les années 1950 dans le cadre de la mondialisation, signe la fin d'une séparation nette entre ville et campagne. Les agriculteurs sont dépendants du cours des matières agricoles fixées en ville tandis que les modes de vie propres aux espaces ruraux tendent à s'effacer derrière les effets de la mondialisation et de l'urbanisation. En effet, l'explosion de la mobilité, la télévision et Internet propagent les valeurs de la ville.
• En outre, les espaces ruraux et urbains sont de plus en plus imbriqués, de sorte qu'il s'opère une homogénéisation des paysages rendant difficile la démarcation entre la fin de la ville et le début des campagnes.
L'étalement urbain
• En effet, avec l'urbanisation, les villes s'étalent de plus en plus dans l'espace. L'étalement urbain désigne la progression des surfaces urbanisées sur la périphérie des villes de manière plus rapide que la croissance démographique. L'automobile a permis de repousser très loin les limites de la ville, produisant un accroissement spectaculaire des mobilités urbaines.
• L'étalement urbain entraîne une réduction des surfaces agricoles, ce qui pose un défi alimentaire majeur. Ainsi, en périphérie de toutes les grandes villes du monde se construisent des lotissements pavillonnaires, car le prix du foncier est plus bas : l'espace périurbain désigne un espace résidentiel situé à la périphérie d'une ville.
• On observe aussi un autre phénomène, la rurbanisation : les espaces ruraux, parfois situés à une distance importante de l'agglomération, s'urbanisent. Des zones résidentielles se construisent et sont investies par d'anciens citadins, qui développent un nouveau mode d'habiter marqué par le mode de vie urbain. Ce processus traduit donc l'imbrication des espaces ruraux et des zones urbanisées.
Des ruralités multiples
• Cette imbrication pose de nombreux problèmes. D'abord l'espace rural est de plus en plus fragmenté : les plus pauvres sont marginalisés et habitent dans des quartiers informels. On observe également un processus d'isolement des plus riches dans des quartiers modernes et fermés.
• En outre, l'étalement urbain conduit au recul des surfaces agricoles et participe de l'explosion de la mobilité. En effet, la plupart des habitants du périurbain et des néoruraux travaillent dans une ville à proximité. L'usage généralisé de l'automobile pose des problèmes d'aménagement (trafic saturé, embouteillages) et de préservation de l'environnement (pollution).
• Enfin, cette imbrication ville/campagne est responsable de l'essor de la multifonctionnalité de l'espace rural. Or, les différentes fonctions de l'espace rural ne sont pas toujours compatibles et peuvent entrer en concurrence. Cela entraîne la multiplication de conflits d'usage de nature diverse : enjeux fonciers, projets d'aménagement, conflits entre néoruraux et agriculteurs…
• Les réalités de la ruralité sont donc multiples. Selon le pays ou le type d'acteur concerné, les enjeux propres aux espaces ruraux diffèrent. De manière générale, leur dépendance vis-à-vis des villes se généralise et pose des problèmes spécifiques.
Exercice n°4Exercice n°5
Exercice n°1
Comment définir l'espace rural ?
Cochez la bonne réponse.
Un espace de campagne marqué par l'abondance de la faune et de la flore.
Un espace qui ne relève pas de l'urbain.
Un espace de faible densité dans lequel l'occupation du sol par la végétation et l'activité agricole sont importantes.
Un espace de faible densité.
Un espace isolé.
Il est difficile de définir les espaces ruraux. Définis en négatif par rapport à la ville, ils se caractérisent généralement par leur faible densité, l'importance de la végétation et la présence d'une activité agricole. Cela dit, ces critères sont soumis à critique, car il existe de très fortes densités rurales, par exemple en Asie du Sud-Est. En outre, avec la mondialisation et l'étalement urbain, on observe un processus d'homogénéisation des paysages et des modes de vie.
Exercice n°2
L'agriculture extensive désigne :
Cochez la bonne réponse.
Un système agricole à fort rendement sur une surface donnée, grâce à la mécanisation et à l'usage d'intrants chimiques.
Un système agricole fondé sur la « révolution verte », c'est-à-dire des techniques d'intensification agricole.
Un système agricole dont les rendements sont faibles, et dont les vastes étendues nécessitent un grand nombre d'emplois.
Un système agricole fondé sur un front pionnier à vocation agricole, comme dans plusieurs pays d'Amérique latine.
Un système agricole spécialisé et tourné vers l'exportation.
L'agriculture extensive ne fait pas appel à des intrants chimiques et se pratique généralement sur de vastes étendues. Dans les pays en développement, les moyens techniques sont limités, et une main-d'œuvre nombreuse compense l'absence de machines. Dans les pays du Nord, l'agriculture extensive peut être pratiquée volontairement par respect pour l'environnement et la biodiversité. Elle permet souvent d'obtenir une certification « Agriculture biologique » (sans intrants chimiques).
Exercice n°3
Qu'est-ce que la multifonctionnalité ?
Cochez la bonne réponse.
Le fait d'avoir plusieurs fonctions.
L'imbrication entre l'espace rural et l'espace urbain du fait de l'étalement urbain.
Le processus de réduction des surfaces agricoles.
Le caractère d'un territoire marqué par l'existence de plusieurs modalités d'habiter l'espace et d'y produire.
L'absence d'unité entre les sous-ensembles d'un même territoire.
Les espaces ruraux n'ont jamais été exclusivement agricoles. D'autres fonctions ont toujours côtoyé l'activité agricole. Par exemple, la fonction industrielle de l'espace rural est ancienne. En France, elle est le premier secteur d'emploi de l'espace rural, loin devant l'agriculture qui ne concerne que 10 % des actifs ruraux. Aujourd'hui, dans les espaces ruraux polarisés par les villes, la fonction résidentielle domine largement. Cela dit, dans les pays développés, de nombreux espaces ruraux profitent d'une attractivité touristique pour redynamiser l'économie locale.
Exercice n°4
L'étalement urbain désigne :
Cochez la bonne réponse.
L'extension des surfaces artificialisées en périphéries des agglomérations urbaines.
La progression des surfaces urbanisées sur la périphérie des villes de manière plus rapide que la croissance démographique.
L'extension rapide et très importante du bâti urbain.
L'artificialisation de surfaces nouvelles.
Un paysage caractéristique des périphéries urbaines.
Dans le cadre d'une généralisation de l'urbanisation, l'accroissement démographique des grandes aires urbaines s'accompagne de la progression de la ville sur les espaces périphériques. Cette augmentation de la superficie des villes s'accompagne d'une diminution de leur densité.
Exercice n°5
Un conflit d'usage signifie :
Cochez la bonne réponse.
L'expression d'une rivalité entre usagers d'un même territoire pour son appropriation, son exploitation ou sa gestion.
Un conflit pour le contrôle de l'espace.
La manifestation de jeux d'opposition entre acteurs.
Une situation conflictuelle entre habitants d'un même espace.
Une occupation à visée politique d'un territoire dans le but de s'opposer à un projet d'aménagement.
La multiplication des acteurs de l'espace rural, la cohabitation de différents modes de vie et modes d'habiter ainsi que la multifonctionnalité favorisent les conflits d'usage. Les intérêts des acteurs peuvent en effet être antagonistes. Par exemple, l'installation d'un parc national dans le but de préserver l'environnement peut rencontrer l'opposition des acteurs économiques.